21 juin 1998
Lycée Militaire d'Autun
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Pour vous et pour la multitude
Cette phrase que les prêtres redisent " In personna Christi
" lors de la consécration du Sang du Christ est lourde de
sens.
Qui est désigné par le " vous " ? Tous ceux qui
ont célébré, qui célèbrent ou qui célébreront
la messe. Le Christ s'adresse à ses disciples, à travers
le temps et l'espace, à tous ses disciples ! Tous les chrétiens,
ayant déjà vécu la messe, sont concernés par
cette phrase, par ce don que le Christ a fait une fois pour toutes lors
de la Cène du Jeudi Saint.
Alors qu'est-il besoin d'ajouter un autre terme ? Ne sont-ce pas les
chrétiens seuls qui sont sauvés par le sacrifice du Christ
? Quelle est cette " multitude " ? Mais Jésus, de son
vivant, n'a-t-il pas dit qu'il était venu pour tous les hommes
et qu'il n'en avait perdu aucun ? Ce mot ne fait-il pas allusion à
la multitude des sauvés de l'Apocalypse qui suivent les 14.400
qui ont lavé leurs vêtements dans le sang de l'Agneau ?
Tout cela nous rappelle que nous ne sommes que dépositaires de
ce don, il ne nous appartient pas. Lorsque nous sommes réunis pour
la messe, nous portons avec nous le monde entier, justes et injustes,
bons et méchants, croyants et incroyants, et nous les présentons
au Père avec le sacrifice de son Fils dans l'Esprit Saint.
Configurés au Christ par le Baptême (cf. la première
lecture, Ga 3,26-29), nous reprenons son rôle d'intercesseur. Comme
il a présenté au Père ses Apôtres et tous ceux
qui, après eux, croiront en lui (cf. le discours sacerdotal en
saint Jean ch 12 à 18), nous présentons les hommes de notre
siècle. Comme Jésus qui n'est pas venu pour jugé
le monde mais pour le sauver , nous n'avons pas à juger nos contemporains
mais à prier pour eux.
Combien de fois Jésus a-t-il dit de nous aimer comme il nous a
aimés ? Non seulement ceux qui nous sont semblables, qui ont la
même foi, la même pensée que nous, mais aussi ceux
qui sont différents. Ne sont-ils pas créés à
l'image de Dieu comme nous ?
En cette veille de dislocation où le Lycée Militaire va
être éclaté dans toutes les directions, réfléchissons
à ces mots du Christ et dans la multitude pour laquelle le sacrifice
est aussi offert, aimons chaque individu…
Père JeanPaul Bouvier
Aumônier du Lycée Militaire d'Autun
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24 juin 2007
Brigade Franco-Allemande
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Unique Jean-Baptiste
Saint Jean Baptiste, avec le ‘Bon Larron’, sont les deux seuls saints
qui n’aient pas connu la résurrection de Christ, et si l’un et l’autre
ont comme ressemblance d’avoir désigné le Christ comme le Roi du Royaume
des cieux, ils n’en sont pas moins très différents…
De plus, rares sont les fêtes de saints qui ont préséance sur les dimanches,
saint Jean Baptiste fait partie de ceux-là ce qui explique que nous le
célébrions aujourd’hui.
Dès le début de sa prédication, saint Jean-Baptiste a appelé à se préparer
à la venue du Messie : « Convertissez-vous car le Royaume de
Dieu est proche ! » Autant que l’ouverture du Nouveau testament,
il est, pour les chrétiens, la conclusion de l’Ancien. Les prophètes inspirés
ont disparu d’Israël, Dieu semble abandonner son peuple sous le joug des
romains, Il ne mandate plus d’hommes pour ramener les descendants d’Abraham
vers Lui.
Le culte devient formel, prêtres, lévites et saducéens insistent sur
les prescriptions rituelles davantage que sur le sens propre des sacrifices
et holocaustes. Les pharisiens mettent en avant la lettre de la Loi et
le respect strict des commandements, en y ajoutant d’autres (tout aussi
obligatoires) qui forment un garde-fou pour préserver ceux qui ont été
édictés par Dieu sur la montagne.
Ce que proclame Jean-Baptiste dans le désert devant des foules qui viennent
écouter sa parole a de quoi choquer et scandaliser ces deux tendances
de la foi juive. Il parle de changer son cœur, rappelant les grandes plaidoiries
d’Isaïe, de Jérémie et d’Ezéchiel, les grands prophètes de l’âge d’or.
Il prône non pas le retour au culte ou à la Loi, mais le retour à l’adoration
de Dieu, gratuite, désintéressée, sincère et reconnaissante. Malgré le
décalage avec la théologie contemporaine, pharisiens et scribes, prêtres
et saducéens viennent entendre sentant bien au fond d’eux-mêmes la justesse
des propos de l’ermite.
Fêter Jean-Baptiste, le précurseur, c’est prendre modèle sur lui. Loin
des idéologies partisanes le chrétien doit laisser parler l’Esprit qui
est en lui. Par le Baptême nous avons reçu l’Esprit de Sainteté et nous
sommes devenus de vrais prophètes. L’amour du Père pour les hommes n’est
pas tributaire d’un endroit ou d’une époque. Ce qui se vit, ce qui se
fait et ce qui se dit autour de nous n’est pas obligatoirement la volonté
du Père et nous le supplions tous les jours pour que sa volonté soit faite.
Comme Jean-Baptiste nous annonçons une vérité qui nous dépasse et qui
ne saurait être assujettie à une culture ; au contraire, nous sommes
les veilleurs qui confrontent les pensées du temps à celles qui conduisent
au Père, par le Fils dans l’Esprit.
Père JeanPaul Bouvier
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20 juin 2010
Fort Neuf de Vincennes
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Gagner ou perdre sa vie
« Oh ! Il gagne bien sa vie ! » Cette phrase
combien de fois l’avons-nous entendue dite d’une façon admirative ou envieuse ?
Mais c’est toujours en référence à une vision matérielle, uniquement par
rapport à l’argent qui entre chaque mois dans l’escarcelle de la personne
dont il est question. De la personne elle-même rien n’est dit, ce n’est
que l’apparence qui est ainsi mise en valeur.
Tous les prophètes de l’Ancien Testament se sont insurgés contre cette
façon d’estimer les hommes et les femmes ; à leur suite, Jésus dénonce
ces personnes qui considèrent seulement l’extérieur, comme ces pharisiens
qui se tiennent ostensiblement dans une attitude de prière en se jugeant
meilleurs que les autres : ils se mettent en valeur mais ne prient
pas réellement (cf. Luc 18,11)
« Celui qui perd sa vie pour moi la sauvera ! »
Ces paroles de Jésus ont dû scandaliser une partie de ses auditeurs :
comment perdre sa vie peut-il être bénéfique ? Que ce soit la vie
physique qui est perdue par la mort ou bien la vie sociale qui est perdue
par une mise au ban. Une des interprétations possibles est qu’il faut
réaliser sa vie avec sa conscience et non pour ce qu’en pensent les autres.
C'est-à-dire qu’en vivant l’Evangile de façon sincère, la personne s’accomplit
parfaitement : la volonté du Père est que l’Homme soit debout, pleinement
humain.
Perdre sa vie pour la sauver c’est aussi accepter de faire des gestes
gratuits, sans esprit de retour : « Lorsque tu donnes un
déjeuner ou un dîner, ne convie ni tes amis, ni tes frères, ni tes parents,
ni de riches voisins, de peur qu'eux aussi ne t'invitent à leur tour et
qu'on ne te rende la pareille. Mais lorsque tu donnes un festin, invite
des pauvres, des estropiés, des boiteux, des aveugles ; heureux seras-tu
alors de ce qu'ils n'ont pas de quoi te le rendre! Car cela te sera rendu
lors de la résurrection des justes. » (Luc14,12-14)
Cette gratuité dans nos actions nous fait passer pour fous dans le monde
mais saint Paul n’écrit-il pas aux Corinthiens : « Mais ce
qu'il y a de fou dans le monde, voilà ce que Dieu a choisi pour confondre
les sages ; ce qu'il y a de faible dans le monde, voilà ce que Dieu
a choisi pour confondre ce qui est fort. » (1 Corinthiens 1,27)
A rappeler l’exigence de l’Evangile et l’amour du prochain, les chrétiens
peuvent apparaître comme inadaptés au monde actuel, voire complètement
en dehors de ce qui est appelé le ‘monde réel’ où règne l’égoïsme
du ‘chacun pour soi’ ; Ils donnent l’impression de ‘perdre
leur vie’ alors que non seulement ils la sauvent mais ils montrent
le chemin qui conduit vers la véritable humanité : celle qui est
en communion avec le Père, le Fils et l’Esprit Saint.
Père JeanPaul Bouvier
Aumônier Catholique du Fort Neuf de Vincennes
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23 juin 2013
Secteur Vermandois
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L’héritage d’Abraham !
Dans son développement, saint Paul montre le passage essentiel de l’Ancienne
à la Nouvelle Alliance : il ne s’agit pas de négliger la promesse
faite à Abraham et à sa descendance mais de lui redonner son sens profond
en Jésus Christ, Fils de Dieu (cf. Marc 1,1) mais aussi bénéficiaire de
l’Alliance en tant que fils de David et descendant d’Abraham, d’Isaac
et de Jacob (cf. généalogie de Jésus en Matthieu 1,1-16)
La promesse faite à Abraham tient en trois points : une descendance,
un pays et la présence de Dieu. Elle avait semblé être réalisée lorsque
le peuple hébreu libéré de l’esclavage d’Egypte conquiert la Palestine
sous la conduite de Josué après les quarante ans passés dans le désert
où lui a été donnée la Loi et où Dieu a fait construire la ‘Tente de
la Rencontre’ pour résider au milieu de son peuple (cf. livres de
l’Exode et de Josué) « De toutes les promesses que le Seigneur
avait faites à la maison d'Israël, aucune ne manqua son effet : tout
se réalisa. » (Josué 21,45) Le désastre de l’Exil à Babylone
remet l’Alliance dans une autre perspective : les juifs ne sont plus
sur leur terre, le Temple de Jérusalem est détruit, Dieu semble les avoir
abandonnés…
Au retour d’Exil et la reconstruction du Temple, la conception de la
Promesse a changé : le peuple élu ne doit pas la recevoir passivement
mais au contraire la vivre quotidiennement comme un signe du don que Dieu
offre à l’humanité.
D’ailleurs, la promesse faite à Abraham ne concerne pas que sa descendance
biologique puisque Dieu précise : « Moi, voici mon alliance
avec toi: tu deviendras père d'une multitude de nations. Et l'on ne t'appellera
plus Abram, mais ton nom sera Abraham, car je te fais père d'une multitude
de nations. » (Genèse 17,14-15) actualisant ainsi la promesse
plus générale que le Créateur avait faite au premier couple humain :
« Soyez féconds, multipliez, emplissez la terre et soumettez-la. »
(Genèse 1,28) promesse renouvelée à Noé : « Pour vous, soyez
féconds, multipliez, pullulez sur la terre et la dominez. » (Genèse
9,7)
A ses contemporains qui revendiquent leur filiation avec Abraham, Jésus
dit : « Ne vous avisez pas de dire en vous-mêmes: "Nous
avons pour père Abraham." Car je vous le dis, Dieu peut, des pierres
que voici, faire surgir des enfants à Abraham. » (Matthieu 3,9)
Il ne s’agit pas simplement d’être des descendants d’Abraham mais de vivre
comme lui : « A celui qui l'en informait Jésus répondit :
"Qui est ma mère et qui sont mes frères ?" Et tendant sa
main vers ses disciples, il dit : "Voici ma mère et mes frères.
Car quiconque fait la volonté de mon Père qui est aux cieux, celui-là
m'est un frère et une sœur et une mère." » (Matthieu 12,48-50)
Par le Baptême, nous sommes configurés au Christ ‘Prêtre, Prophète
et Roi’, devenus, frères et sœurs du Fils de Dieu saint Paul s’adresse
à nous autant qu’à ses correspondants de Galatie : « c'est
vous qui êtes la descendance d'Abraham ; et l'héritage que Dieu lui a
promis, c'est à vous qu'il revient » (Galates 3,29)
Père JeanPaul Bouvier
Curé in solidum du secteur Vermandois
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19 juin 2016
Secteur Vermandois
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n°879
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Vous ne faites plus qu’un dans le Christ Jésus
Cette phrase de saint Paul pourrait prêter à confusion, il ne veut pas
dire qu’il y aurait une ‘fusion’ dans un ‘tout’ indéfini,
il signifie une communion profonde entre les personnes et le Christ Jésus
semblable – mais non identique – à la communion de la Sainte Trinité où
trois personnes distincte sont un seul Dieu. Il explique davantage sa
conception dans l’épître aux Romains : « Prenons une comparaison :
en un corps unique, nous avons plusieurs membres, qui n’ont pas tous la
même fonction ; de même, nous qui sommes plusieurs, nous sommes
un seul corps dans le Christ, et membres les uns des autres, chacun pour
sa part. » (Romains 12,4-5) Chacun garde son individualité propre
en rendant l’ensemble cohérent dans le projet de Dieu.
C’est également ce que le Christ sous-entend lorsqu’il dit de perdre
sa vie ou de prendre sa croix : le disciple du Fils vit de la vie
éternelle : « ce n’est plus moi, c’est le Christ qui vit
en moi » (Galates 2,20) S’il participe au ministère du Christ
en propageant la Bonne Nouvelle afin que tous soient sauvés, il ne le
fait pas de son propre chef mais il est animé par l’Esprit Saint dans
la communion de l’Eglise et avec l’aval de cette dernière, les Apôtres
ne condamnent-ils les prédicateurs qui jettent le ‘trouble et le désarroi’
dans les communautés en agissant ‘sans aucun mandat de leur part’
(cf. Actes 15,24)
« On n’est pas chrétien tout seul » Ce chant écrit dans
années 80 (ref. SEL 25) rappelait l’importance de la communauté non seulement
entre les personnes mais également entre les différentes tendances spirituelles
et les multiples mouvements d’Eglise ; les disciples du Christ et
les groupes de chrétiens sont tous unis dans une ‘Eglise une, sainte,
catholique et apostolique’ (cf. symbole de Nicée-Constantinople) Mais
cette phrase va plus loin que de manifester l’unité des membres Baptisés
dans l’Eglise, les communautés chrétiennes ne vivent pas repliées sur
elles-mêmes comme si elles étaient immiscibles dans le monde des hommes ;
‘On n’est pas chrétien tout seul’ signifie aussi une ouverture
sur ceux qui n’ont pas eu la possibilité de rencontrer Celui qui est ‘Le
Chemin, la Vérité et la Vie’ (cf. Jean 14,6)
Les extraits de l’épître aux Galates et de saint Luc nous proposent une
identification au Christ dans sa mission dans le monde : « Je
ne prie pas pour que tu les retires du monde, mais pour que tu les gardes
du Mauvais. Ils n’appartiennent pas au monde, de même que moi, je n’appartiens
pas au monde. De même que tu m’as envoyé dans le monde, moi aussi, je
les ai envoyés dans le monde. » (Jean 17,15-16.18) ‘Celui
qui veut marcher à la suite du Christ’ est envoyé en mission par le
Fils et cette prière pour les disciples s’adresse à nous, à moi personnellement,
membres du Corps du Christ. Je réponds à l’Eglise qui me dit : « Confiance,
lève-toi ; il t’appelle » (cf. Marc 10,49) car ‘le Père
me garde du Mauvais !’
Père JeanPaul Bouvier
Curé in solidum du secteur Vermandois
administrateur des paroisses de Nesle et Athies
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