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12 avril 2020
Dimanche de le Résurrection
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Pierre aperçoit – Le Disciple voit !
Actes 10,34a.37-43 - Psaume 118 - Colossiens 3,1-4
ou Corinthiens 5, 6b-8 matin : Jean 20,1-9 ou soir : Luc
24,13-35
Dans le texte grec du IVème évangile les deux verbes sont différents, même
si un traducteur peu attentif pourrait les traduire tous les deux par ‘voir’.
Le premier celui qui s’applique à Pierre, traduit ici par ‘apercevoir’
est voir en spectateur, poser son regard ; le second pour l’autre
Disciple’ signifie voir en analysant, discerner, découvrir.
Cela correspond à l’attitude de ces deux hommes : Pierre contemple
la scène avec étonnement, il constate ce que Marie-Madeleine leur a dit,
le tombeau est vide, le corps de Jésus n’est pas là, où peut-il avoir
été mis ? Pour l’autre Disciple, au contraire, l’évidence saute aux
yeux, si le Christ n’est pas dans le linceul bien étalé à sa place, il
est ressuscité ! Non pas comme Lazare avait été réanimé : « Et
le mort sortit, les pieds et les mains liés par des bandelettes, le visage
enveloppé d’un suaire. Jésus leur dit : ‘Déliez-le, et laissez-le
aller.’ » (Jean 11,44). Le Christ est sorti d’une façon tout
à fait différente, ayant abandonné les linges mortuaires à leur place.
L’autre Disciple perçoit ainsi la révélation du mystère de la Résurrection.
Pierre est un des disciples de la première heure, choisi parmi les Apôtres
puis établi comme berger des brebis du Seigneur. Il a été témoin de la
Transfiguration de Jésus parlant avec Moise et Elie (cf. Marc 9,2) tout
en se demandant ce que voulait dire ressusciter d’entre les morts (cf.
Marc 9,10). Mais il n’a pas pu veiller avec le Christ au jardin de l’agonie
(cf. Marc 14,37) et il va jusqu’à renier Celui dont il disait être prêt
à mourir pour Lui (cf. Marc 14,72).
L’autre disciple n’apparaît qu’au moment de la Cène. Il est placé entre
Pierre et Jésus (cf. Jean 13,23-24). Au pied de la Croix, il reçoit la
Vierge Marie comme Mère et il devient son fils. C’est lui parmi tous les
disciples qui reconnaîtra et montrera à Pierre le Seigneur Ressuscité
présent au bord du lac (cf. Jean 21,7)
Chacun d’entre nous a, comme Pierre et l’autre disciple, son propre charismr
pour annoncer l’Evangile et nous nous retrouvons avec eux dans l’immense
communion des saints, « une foule immense, que nul ne pouvait
dénombrer, une foule de toutes nations, tribus, peuples et langues. Ils
se tenaient debout devant le Trône et devant l’Agneau, vêtus de robes
blanches, avec des palmes à la main. » (Apocalypse 7,9). Dans
l’atmosphère de confinement actuel, nous ressentons plus encore cette
présence intemporelle de l’Eglise.
Père JeanPaul Bouvier
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13 avril 2020
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Arranger ma vérité
Actes des Apôtres 2, 14.22b- 33 - Psaume 15 (16), 1-2a.5,
7-8, 9-10, 11 - Matthieu 28, 8-15
Lors de son procès, les grands-prêtres avaient fait venir de faux témoins
pour affirmer devant leur tribunal que Jésus voulait détruire le Temple.
Après sa mort, ils ont soudoyé les soldats de garde au Tombeau pour qu’ils
accusent les disciples du vol de son cadavre.
Comme c’est facile de maquiller la vérité pour la faire correspondre
à ce qui est souhaité qu’elle soit. Ce n’est pas toujours volontaire,
tous les scientifiques savent que leur lecture des résultats d’une expérience
est directement influencée par ce qu’ils cherchaient à démontrer en montant
cette étude.
Pour les grands-prêtres, il était impossible que Jésus ressuscitât ;
donc il n’est pas ressuscité, mais le corps a été dérobé. Pour saint Thomas
aussi c’était impossible, il demandait les preuves des sévices que le
supplicié avaient endurés : les trous dans les mains et la plaie
dans le côté et il obtient cette réponse : « Parce que tu
m’as vu, tu crois. Heureux ceux qui croient sans avoir vu. »
(Jean 20,29). Pour beaucoup de nos contemporains, c’est tout aussi impossible,
cela ne peut être qu’une mystification.
Les chrétiens par la grâce des Sacrements reçoivent l’Esprit de discernement
qui leur permet d’analyser les événements les plus inattendus et d’y distinguer
l’action du Seigneur : « Car rien n’est impossible à Dieu. »
(Luc 1,37)
En particulier dans cette crise que nous traversons, devant toutes ces
personnes qui risquent leur vie pour sauver celle des autres cela rappelle
la phrase de Jésus : « Il n’y a pas de plus grand amour que
de donner sa vie pour ceux qu’on aime. » (Jean 15,13) Toutes
n’ont pas la foi mais elles reconnaissent en l’Autre un frère ou une sœur.
Nous redécouvrons aussi les liens de la famille que nous en soyons éloignés
ou (trop) proches. Et pour nous tout particulièrement, nous redonnons
à la communauté toute son importance depuis que nous en sommes privés.
Devant tous ces bouleversements, nous entendons tout spécialement les
paroles du Christ glorieux : « Il était là au milieu d’eux.
Il leur dit : « La paix soit avec vous ! » (Jean
20,19) et aussi : « Et moi, je suis avec vous tous les jours
jusqu’à la fin du monde. » (Matthieu 28,20)
Père JeanPaul Bouvier
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14 avril 2020
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Que devons-nous faire ?
Actes des Apôtres 2, 36-41 - Psaume 32 (33), 4-5, 18-19,
20.22 - Jean (20, 11-18)
Combien de fois, en tant que confesseur, j'ai entendu
cette question : ‘Que dois-je faire ??’ Et à chaque fois,
je repense à cette même question qui est posée à saint Pierre le jour
de la Pentecôte. Et à chaque fois, je suis frappé par la simplicité de
la réponse de l’Apôtre : « Convertissez-vous ! »
suivi de la promesse : « Vous recevrez alors le don du Saint-Esprit. ».
Quelle leçon devons-nous tirer de cette péricope des
Actes des Apôtres ? En premier lieu que le message de l'Evangile
nous renvoie toujours à notre propre conscience éclairée par l’Esprit
: ‘Que dois- je faire ici et maintenant ? Est-ce que c’est inspiré
par Dieu ?’ La réponse dépendra des circonstances : celle que
je vais donner aujourd'hui n'est peut-être pas celle que je donnerai demain
ou que j'aurais donnée hier et elle est certainement différente de celle
que donnerait une autre personne.
Dieu le Père a créé l'être humain libre en lui laissant
même la possibilité de se séparer de son Créateur ; Dieu le Fils nous
propose un chemin pour venir vers le Père et met en nous, par les Sacrements
qu'il nous a laissés, Dieu l'Esprit pour que nous ayons en nous la force
de prendre cette route.
L'Eglise, inspirée par l'Esprit Saint, conseille de faire
un ‘examen de conscience’ le soir pour reprendre sa journée avec
le Seigneur, non pas seulement en fonction d'une loi, mais en fonction
des contingences qui m'ont amené à faire tel acte ou à dire telle parole.
Le passage d'Evangile d'aujourd'hui est une invitation à regarder ma vie
comme le Christ regardait ceux qui venaient vers lui, sans complaisance
mais avec amour.
La réponse à la question initiale est donc une autre
question : " Que ferait le Christ s'il était à ma place ? "
La direction que je donnerai à ma vie sera beaucoup plus claire et plus
évangélique.
Père JeanPaul Bouvier
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15 avril 2020
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Esprits lents à comprendre
Actes des Apôtres 3, 1-10 - Psaume 104 (105), 1-2,
3-4, 6-7, 8-9 - Luc 24, 13-35
Lorsqu’il s’adresse aux pèlerins d’Emmaüs, le Christ
ressuscité leur reproche de ne pas avoir compris à partir des Ecritures
qu’il fallait qu’il souffrît. La lecture messianique des textes de la
Bible, à l’époque de Jésus, envisageait un roi comme David qui rétablirait
le Grand Israël comme royaume autonome en rejetant toute occupation
étrangère. Les psaumes et les chants du serviteur souffrant du prophète
Isaïe étaient lus comme les avanies que subissait le peuple de Dieu depuis
deux ou trois siècles avec des occupations successives par différents
peuples. Les scribes et les rabbis y voyaient davantage la prédication
de la profanation du Temple à la période des frères Maccabées (voir les
livres des Martyrs d’Israël) que s’appliquant à un seul homme.
Les disciples du Christ n’ont pas pu comprendre que ces
messages faisaient allusion à Jésus. Le titre de fils de l’homme que Jésus
se donnait dans ses paraboles et ses discours évoque une venue dans la
gloire et non dans une condamnation d’émeutier entraînant l’infamie d’une
mort sur la croix.
Mais nous sommes vingt siècles après les événements ;
nous n’avons pas l’excuse d’une interprétation limitée des textes sacrés,
depuis deux mille ans des commentaires, des méditations, des homélies
ont développé cet aspect de la mission du Christ.
Pourtant, comme les compagnons d’Emmaüs, nous aimerions
ne retenir que le côté glorieux et nous sommes quelquefois déçus que le
Christ ne se manifeste pas dans sa gloire dès aujourd’hui. L’Ecriture
nous donne les clefs de l’action à mener. Ne nous contentons pas d’une
explication habituelle et scolastique, dans notre méditation de la Parole
de Dieu, laissons-nous saisir par le Christ qui nous expliquera l’interprétation
à en donner pour notre temps.
Père JeanPaul Bouvier
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16 avril 2020
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Vous serez mes témoins
Actes des Apôtres 3, 11-26 - Psaume 8, 4-5, 6-7, 8-9
- Luc 24, 35-48
Le mot ‘témoin’ est beaucoup plus fort que la façon dont
il est utilisé habituellement ; le mot grec est marturos dont la
tradition a utilisé la translittération en martyre (l’exécution) et martyr
(la personne).
Le chrétien est donc, par définition même, un martyr puisqu’il est appelé
à témoigner à temps et à contretemps de cet événement inouï qu’est la
Résurrection du Christ, gage de notre propre résurrection à la fin des
temps.
Une tentation serait de se dire que tout le monde connaît Jésus-Christ
est qu’il n’est plus nécessaire de l’annoncer dans notre société.
C’est vrai et c’est faux.
C’est vrai parce que la personne humaine de Jésus est enseignée dans
les collèges au point de vue historique, comme un individu qui a marqué
son époque et que ses disciples ont transformé l’histoire du monde occidental
jusqu’à aujourd’hui.
C’est faux parce que la Personne divine de Jésus, le Fils unique du Père
et coéternel à Lui, n’est plus tellement perçue par nos contemporains,
voire même par certaines personnes qui se disent chrétiennes.
Notre témoignage d’aujourd’hui a donc un autre point d’application que
celui que les Apôtres ont eu, même si le message à faire passer n’a pas
changé d’un iota. >Nous devons dégager le Christ Jésus de son image
de « fondateur de religion » pour lui rendre, dans la
conscience des hommes, son action de Sauveur.
Dans notre époque matérialiste, il est important de souligner que le
Salut n’est pas une affaire de réussite sociale mais de réussite humaine.
En nous dégageant de la course au biens matériels, nous pourrons être
comme le dit l’Apôtre Paul des coureurs du Christ, ceux qui courent pour
la palme du vainqueur et non pour une récompense en espèces sonnantes
et trébuchantes (cf. 1Corinthiens 9,24). En avançant sur le chemin du
Christ nous n’aurons peut-être pas la considération de nos contemporains,
mais nous pourrons nous épanouir dans notre humanité pour devenir vraiment
homme comme le Christ lui-même.
« Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait. »
(Matthieu 5,48) disait Jésus à ses Apôtres, prenons cette exhortation
pour nous aujourd’hui, nous sommes appelés à la perfection et, au lieu
de dire que ce n’est pas possible, que personne ne peut être parfait,
faisons confiance à l’Esprit que nous recevons quotidiennement et témoignons
d’un Christ vivant qui n’abandonne pas des disciples.
Père JeanPaul Bouvier
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17 avril 2020
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C’est le Seigneur !
Actes des Apôtres 4, 1-12 - Psaume 117 (118), 1-2.4,
22-24, 25-27a - Jean 21, 1-14
Une fois de plus le ‘disciple que Jésus aimait’ est le premier
à reconnaître le Seigneur ressuscité. Comme le matin de la Pâques, au
moment où il est entré dans le tombeau après s’être effacé devant Simon-Pierre :
« il voit et il croit » (cf. Jean 20,8). Il regarde les
événements avec les yeux de la foi !
Apparemment, les autres disciples n’ont pas été troublés par la pêche
miraculeuse que cet inconnu leur a permis de faire. Cent cinquante-trois
gros poissons ! Ils auraient dû se rappeler du début du ministère
public de Jésus (cf. Luc 5,4-6) A l’époque ils avaient reconnu en Lui
l’envoyé de Dieu, Celui que tout Israël attendait « Alors ils
ramenèrent les barques au rivage et, laissant tout, ils le suivirent. »
(Luc 5,11)
« Aucun des disciples n’osait lui demander : ‘Qui es-tu ?’
Ils savaient que c’était le Seigneur. » Cette attitude des disciples
surprend, ils semblent être pétrifiés devant cette apparition, ils attendent
de savoir ce que le Christ leur veut.
Ce passage de l’évangile de saint Jean est instructif pour nous puisque
nous sommes chrétiens, disciples du Christ.
Quelquefois, nous faisons ce que nous savons faire, comme ces pêcheurs
qui connaissent bien leur métier, mais sans efficacité. Nous avons besoin
que le Christ vienne nous dire de recommencer, mais cette fois avec Lui,
sur Ses conseils pour que ce soit ‘productif’ : « C’est
ainsi que tout arbre bon donne de beaux fruits » (Matthieu 7,17)
Quelquefois, nous savons reconnaître la présence du Christ comme ‘le
disciple que Jésus aimait’ et nous la signalons autour de nous à ceux
qui ne l’ont pressentie même si ce sont d’autres que nous qui prendront
l’initiative d’aller au-devant de Lui.
Quelquefois, comme Simon-Pierre nous nous ‘jetterons à l’eau’
(au sens figuré) pour rejoindre le Seigneur après nous y être préparés
pour que nous soyons présentables devant Lui.
Notre vie spirituelle est une alternance entre ces attitudes, et bien
d’autres, mais toujours guidée par une approche du Christ. Le temps de
confinement que nous vivons permet de relire notre passé pour y découvrir
les appels du Seigneur.
Père JeanPaul Bouvier
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35
18 avril 2020
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Refus de croire
Actes des Apôtres 4, 13-21 - Psaume 117 (118), 1.14-15ab,
16-18, 19-21 Marc 16, 9-15
Un jour, un homme apostropha un prêtre à la sortie de la messe :
- Je ne crois pas en Dieu et j’en suis fier !
- Avez-vous lu l’Ancien Testament ?
- Non ! Je vous dis que je ne crois pas en Dieu !
- Avez-vous lu le Nouveau Testament ?
- Puisque je vous dis que je ne crois pas !
- Avez-vous lu les écrits des saints, de l’Eglise, des papes ?
- Mais enfin ! Je vous dis que je ne crois pas !
- Alors ne dites pas que vous ne croyez pas, dites que vous êtes ignorant
et ne soyez pas fier de votre ignorance.
Ce n’était pas le cas des disciples. Depuis leur plus tendre enfance,
ils avaient été baignés dans la culture et les textes bibliques. Pendant
pratiquement trois ans, ils ont suivi Jésus, ils ont vécu avec Lui, ils
ont vu les miracles qu’il a fait, ils ont entendu ses prédications, ses
appels pour croire en Lui comme Sauveur, ses annonces de la Passion et
de la Résurrection.
Pourtant lorsque Marie-Madeleine vient leur dire qu’elle L’a vu et qu’Il
est vivant, ils refusent de la croire et ils continuent « à s’affliger
et à pleurer ». Comme ce n’est pas humainement possible, cela
ne peut pas être vrai. De même lorsque deux hommes qui avaient quitté
Jérusalem désespérés de la mort de Celui qu’ils croyaient « que
c’était lui qui allait délivrer Israël. » (Luc 24,21) reviennent
leur annoncer qu’ils L’ont rencontré sur la route, les disciples ne les
croient pas. Ils sont tous comme Thomas : « Si je ne vois
pas dans ses mains la marque des clous, si je ne mets pas mon doigt dans
la marque des clous, si je ne mets pas la main dans son côté, non, je
ne croirai pas ! » (Jean 20,25). Il faut que le Christ Ressuscité
lui-même se manifeste à eux pendant le repas (comme pour les compagnons
d’Emmaüs)
Et nous ? Nous connaissons l’Ecriture et tout ce que l’Eglise nous
a transmis à travers les siècles ; par les Sacrements nous recevons
l’Esprit Saint qui nous permet d’interpréter tous les signes qui nous
sont donnés et l’œuvre du Christ dans le monde et comme à ses disciples
« il leur reprocha leur manque de foi et la dureté de leurs cœurs »
Le confinement que beaucoup d’entre nous sont obligés de vivre devrait
nous permettre d’approfondir notre lecture de cette parole pour ne plus
être ignorants comme cet homme qui se disait athée. Le Seigneur nous donne
cette opportunité, ne la laissons pas passer !
Père JeanPaul Bouvier
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