26 jullet 2003
Forces Armées de Guyane
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n°200
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Supportez-vous les uns les autres…
Vaste programme !
Le Christ nous demande de nous aimer les uns les autres, saint Paul,
en demandant que nous nous supportions les uns les autres, n’est pas moins
exigeant.
En lecture cursive, nous pourrions comprendre le verbe ‘supporter’
comme une tolérance dans le sens où je supporte la douleur, même si elle
est difficile à accepter. Devrais-je supporter les autres de cette manière-là ?
Dans l’esprit de saint Paul, il ne s’agit pas d’accueillir de façon superficielle,
sans se donner complètement. Il s’agit réellement de ‘supporter’
les autres comme un arc-boutant supporte le poids de l’église gothique,
c’est à dire en maintenant ferme dans la foi. Se supporter les uns les
autres n’a donc rien à voir avec une tolérance laxiste, mais au contraire
une exigence d’aide et d’amour vis à vis de frères et sœurs plus faibles
dans la foi et dans la pratique quotidienne du christianisme.
C’est le support mutuel des chrétiens entre eux qui construit l’Eglise.
La prière de chacun sert au salut de tous, l’action de chacun sert à l’édification
de tous. Chacun selon sa vocation propre et ses talents personnels est
une pierre indispensable de l’édifice complet. Certains sont appelés par
Dieu à être des guides spirituels que l’Eglise met en exergue, d’autres
à des fonctions de gestion ou à des offices d’enseignement, tâches sans
doute plus discrètes et plus ingrates mais nécessaires.
Des hommes sont appelés par Dieu pour rendre le Christ présent aux différentes
communautés, les diacres rendent présent le Christ serviteur ; les
prêtres rendent présent le Christ prêtre offrant constamment son sacrifice
au Père dans l’Esprit ; les évêques rendent présent le Christ pasteur
et enseignant ; mais tous les baptisés rendent présent le Christ
au monde contemporain chacun selon l’appel qu’il a reçu personnellement
de Dieu.
La prière commune et la prière personnelle nous permettent de nous sentir
épaulés par tous les autres chrétiens afin de répondre à cet appel dans
l’Eglise et avec elle
père JeanPaul Bouvier
Aumônier catholique des Forces Armées en Guyane
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29 juillet 2012
Fort Neuf de Vincennes
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n°626
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Un jeune garçon anonyme
Le quatrième évangéliste insiste sur l’importance de l’assistance, il
précise une ‘grande’ foule et un verset après une foule ‘nombreuse’.
Ces gens se précipitent pour voir et écouter cet homme dont la parole
touche le cœur et non pas seulement l’intelligence : il fait comprendre
la portée du projet de Dieu sur l’humanité et chaque personne se sent
radicalement concernée et transformée.
Mais Jésus ne se contente pas de délivrer son message, il a le souci
de chaque homme et de chaque femme individuellement y compris dans les
détails matériels comme la nourriture ; cette multitude a besoin
d’une alimentation spirituelle mais leur corps a aussi besoin d’une nourriture
plus concrète. Le Christ ‘teste’ la confiance de ses disciples
en leur demandant d’aller acheter du pain pour nourrir cette foule. Philippe
n’y voit que l’impossibilité financière, le groupe des Apôtres n’a pas
assez d’argent pour ‘acheter’ du pain ; André recense ce qu’ils
ont : cinq pains et deux poissons qu’un jeune garçon a apportés avec
lui.
Jésus aurait pu transformer des pierres en pain comme le Diable l’avait
suggéré dans les tentations au désert (cf. Luc 4,3) ; il aurait pu
renouveler le miracle de la manne (cf. Exode 13,31sv.) ; il aurait
pu créer du pain ex nihilo mais il a voulu que cela vienne de l’assemblée,
que ce soit une participation active de ceux qui l’écoutent. C’est donc
ce qu’avait apporté un jeune garçon dans son sac qui sert de base au miracle
de la multiplication des pains.
Ce ‘jeune garçon’ reste anonyme, nous savons simplement qu’il
accepte de partager avec Jésus ce qu’il a prévu pour son propre repas,
sans se douter que sa petite contribution va permettre de nourrir ‘cinq
mille hommes’…
Chacun d’entre nous, chrétiens d’aujourd’hui, est ce jeune garçon !
Ce passage de l’Evangile nous interroge sur ce que nous possédons :
cherchons ce que-nous pouvons mettre aujourd’hui à la disposition du Christ
et de son Eglise ? Même si nos forces et nos moyens nous semblent
dérisoires, soyons sûrs que, s’ils sont donnés avec foi et confiance,
ils serviront à nos frères et sœurs, bien au-delà de leur nécessaire,
cela deviendra surabondant, nos ‘cinq pains d’orge’ deviendront,
après satiété, ‘douze paniers pleins’… Ce que nous offrons n’est
pas une question de quantité ou de valeur, la ‘pauvre veuve’ n’offrait
que ‘deux piécettes’ (cf. Luc 21,1-4) au Temple de Dieu et pourtant
elle provoque l’admiration de Jésus parce qu’elle les donne sans arrière-pensée.
L’Evangile est un guide pour nos vies, les personnages secondaires –
comme ce jeune garçon – nous montrent des façons de servir le Christ,
elles sont diverses, variées et adaptées à la personnalité de chacun.
Il est bon de tirer profit de ces exemples pour que chacun trouve sa propre
voie.
Père JeanPaul Bouvier
Aumônier du Fort Neuf de Vincennes
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26 juillet 2015
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n°826
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Miracles participatifs
La liturgie de l’Eglise nous propose deux récits de multiplication de
nourriture : celui d’Elisée dans le second livre des Rois avec vingt
pains d’orge et un sac de grains et celui de Jésus avec cinq pains d’orge
et deux poissons. Le récit d’Elie et la veuve de Sarepta aurait pu être
ajouté : malgré la disette qui règne depuis plusieurs années, la
femme donne au prophète la poignée de farine et le peu d’huile qui lui
restent pour faire le dernier repas avec son fils : « Et
la jarre de farine ne s’épuisa pas, et le vase d’huile ne se vida pas,
ainsi que le Seigneur l’avait annoncé par l’intermédiaire d’Elie. »
(1Rois 17,16)
Bien qu’elles aient des réticences, ces personnes font confiance à l’homme
de Dieu, Elie, Elisée et Jésus. Le miracle n’est possible qu’avec l’aide
de ces dons faits par cette veuve, le prophète ou ce jeune garçon ;
tous, ils avaient prévu pour eux-mêmes la nourriture nécessaire, les personnes
sont si nombreuses pour si peu de denrées, chacun ne pourra même pas en
avoir une miette.
Mais leur confiance envers la parole de ces hommes de Dieu s’avère être
plus importante que leur égoïsme, ils donnent ce qu’ils ont.
Au-delà du miracle – pourtant important pour notre foi – il faut aussi
remarquer l’abnégation de ces donateurs : comme la pauvre veuve aux
deux piécettes du Temple (cf. Marc 12,42-44) eux aussi « ont pris
sur leur nécessaire. » Sans chercher de raison particulière,
ils donnent tout ce qu’ils ont parce que le Seigneur le leur demande.
Dans notre vie de chrétien d’aujourd’hui, nous devons avoir ces exemples
devant les yeux ; nous aussi nous avons des réticences à donner de
la nourriture, de l’argent, notre temps, tout ce dont nous estimons être
une nécessité absolue pour nous-mêmes. Mais si nous confions cela au Seigneur,
au nom de Jésus-Christ, nous constaterons que nous ne serons pas privés
de tous ces biens : le Seigneur les aura multipliés pour que chacun
ait à satiété : la veuve de Sarepta a pu manger « longtemps »
à partir de ce qu’elle gardait pour un dernier repas avant de mourir de
faim ; les disciples d’Elisée ont mangé et il en restait ; les
foules qui suivaient Jésus ont « mangé à leur faim »
et ils « remplirent douze paniers avec les morceaux des cinq pains
d’orge »
Dans un esprit de discernement, nous devons rechercher les dons que le
Seigneur a mis en nous – même, et surtout, ce à quoi nous ne penserions
pas immédiatement – pour les mettre à la disposition de la communauté
humaine : ce dons ne nous seront pas enlevés mais au contraire, ils
fructifieront et nous en serons les premiers bénéficiaires : « A
celui qui a, on donnera encore, et il sera dans l’abondance »
(Matthieu 25,29)
Ainsi « Quand le Fils de l’homme viendra dans sa gloire »
nous pourrons l’entendre dire : « Venez, les bénis de mon
Père, recevez en héritage le Royaume préparé pour vous depuis la fondation
du monde. » car « chaque fois que vous l’avez fait à
l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. »
(Matthieu 25,31.34.40)
Père JeanPaul Bouvier
Curé in solidum du secteur Vermandois
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29 juillet 2018
Paroisses Nesle & Athies
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n°1023
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Action de grâce
Comme les ‘vierges sages’ qui attendent l’époux au retour de ses
noces qui avaient prévu de l’huile pour leur lampe (cf. Matthieu25,1-13),
ce jeune garçon avait emporté de quoi manger car il savait bien que l’enseignement
de Jésus serait long. Il avait de quoi tenir un ou deux repas. Sans doute
d’autres personnes avaient, elles aussi, été prévoyantes, mais c’est un
‘petit’ qui n’est pas encore adulte qui partage librement ce qu’il
a : cinq pains d’orge et deux poissons !
Le Christ dit une action de grâce (en grec : ‘eucharisto’)
et chacun, « environ cinq mille hommes », a pu manger
à sa faim et il reste douze paniers avec les morceaux de pain non consommés,
« pour que rien ne se perde » dit Jésus. Ce qui restait
de la manne dans le désert devenait infect s’elle était conservée (cf.
Exode 16,20) sauf pour le jour du sabbat où la manne ne se déposait pas,
celle de la veille se gardait intact alors une journée supplémentaire.
Le IVème évangéliste voit dans cette multiplication des pains
la préfiguration de l’Eucharistie où la présence du Christ perdure sans
altération comme le dit le Psaume (15[16],9-10) : « Mon cœur
exulte, mon âme est en fête, ma chair elle-même repose en confiance :
tu ne peux m'abandonner à la mort ni laisser ton ami voir la corruption. »
C’est tout à fait intentionnellement que le ’disciple que Jésus aimait’
utilise dans ce passage la formulation que les autres évangélistes relateront
au moment de la Cène : « Puis, ayant pris du pain et rendu
grâce, il le rompit et le leur donna, en disant : ‘Ceci est mon corps,
donné pour vous. Faites cela en mémoire de moi.’ » (Luc 22,19).
Ce geste qui permet aux compagnons d’Emmaüs de le reconnaître (cf. Luc24,35)
Le pain rompu que le prêtre élève avant la communion en invitant la foule
à reconnaître en lui le corps du Fils : « Heureux les invités
au repas du Seigneur ! Voici l’Agneau de Dieu qui enlève le péché
du monde »
La foule qui avait été rassasiée par les cinq pains et les deux poissons
du jeune garçon n’ont vu que le miracle extérieur ; ils ont désiré
avoir cet homme comme roi afin d’être assurée de manger à sa faim, mais
Jésus se retire seul dans la montagne loin d’elle. Au contraire, lorsque
notre faim spirituelle est assouvie par la communion au Corps du Christ,
le Fils éternel accepte que nous le reconnaissions comme Roi et nous invite
à construire le Royaume avec lui en nous envoyant en mission avec ce que
nous avons même si nos moyens paraissent faibles « qu’est-ce que
cela pour tant de monde ! ». Par l’action de grâce du Christ, le peu
que nous mettons à la disposition du Fils permet à une foule immense d’être
nourrie par la Parole.
Père JeanPaul Bouvier
Curé de la Paroisse Notre Dame de Nesle
& modérateur de la Paroisse sainte Radegonde
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25 juillet 2021
Paroisses Nesle & Athies
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n°1228
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Participation à l’œuvre de Dieu
Jésus provoque ses disciples en leur proposant d’aller acheter du pain
pour nourrir « une foule nombreuse » Philippe déclare
de façon péremptoire : « Le salaire de deux cents journées
ne suffirait pas pour que chacun reçoive un peu de pain. » (Jean
6,7) ; il refuse de croire que cela soit possible, il représente
tous ceux qui doutent de la Parole du Christ ; n’est-ce pas lui qui
va dire à Jésus : « Montre-nous le Père : cela nous
suffit » (Jean 14,8). André est le premier à avoir suivi Jésus
lorsque Jean Baptiste l’a désigné comme l’Agneau de Dieu, Jésus lui dit
alors ; « Venez et vous verrez ! » (Jean 1,39)
C’est ce disciple qui va dire timidement : « Il y a là un
jeune garçon qui a cinq pains d’orge et deux poissons, mais qu’est-ce
que cela pour tant de monde ! » (Jean 6,9) André ne sait pas ce qu’il
attend mais il sait que le Maître va faire quelque chose.
Pourtant ces deux disciples proches de Jésus connaissaient le texte où
Elisée nourrit miraculeusement cent hommes avec seulement vingt pains
qui lui ont été donnés (2Rois 4,42-44 – première lecture)
Pour le prophète Elie réfugié chez une veuve et son fils à Sarepta, le
Seigneur Dieu accomplit le miracle en permettant que la jarre de farine
et le vase d’huile qui restaient pour confectionner une dernière galette
pour la mère et le fils, suivant la parole de Dieu : « Jarre
de farine point ne s’épuisera, vase d’huile point ne se videra, jusqu’au
jour où le Seigneur donnera la pluie pour arroser la terre. » (1Rois
17,14) et cela va durer trois ans
Dans ces trois miracles, il est mis en évidence que le Seigneur veut
que nous participions : la veuve de Sarepta accepte de partager avec
le prophète Elie ce qui lui reste pour son dernier repas avec son fils ;
Elisée ne retient pas pour son usage personnel les vingt pains qu’il a
reçus ; le jeune garçon donne de bon cœur ses provisions : deux
pains et cinq poissons à Jésus.
La multiplication des pains pour nourrir une foule nombreuse est pour
le IVème évangéliste un signe avant-coureur du « pain
de vie » c’est-à-dire de la chair que le Christ propose :
« Prenez- et mangez en tous, ceci est ma chair livrée pour vous »
comme dans les textes bibliques, nous devons participer et ne pas rester
des spectateurs inactifs et au moment d’aller communier, invités par Dieu-le-Fils,
nous devons nous demander quelle est notre part offerte pour participer
à cette multiplication des pains. Qu’est-ce que j’abandonne pour le bien
de tous ?
Père JeanPaul Bouvier
Curé de la Paroisse Notre Dame de Nesle
& modérateur de la Paroisse sainte Radegonde d’Athies
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28 juillet 2024
Maison Marie-Thérèse
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n°1397
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Donner secrètement
Il y a un tel parallélisme entre le texte de l’évangile de saint Jean
(6,1-15) et celui de saint Marc (6,30-34) qui était lu dans les églises
la semaine dernière qu’il est légitime de penser qu’il s’agit de la relation
du même épisode du ministère de Jésus. Dans les deux évangiles, il est
noté que Jésus souhaitait s’isoler avec ses Apôtres, cherchant un peu
de calme et de repos. Mais les foules enthousiasmées par les signes qu’elles
avaient vu sur les malades et aussi par paroles d’enseignement du Christ
en décident autrement et elles se précipitent en contournant le lac de
Tibériade que le groupe apostolique a traversé en barque ; à l’arrivée
Jésus est attendu par de nombreuses personnes.
La compassion de Jésus envers un troupeau sans berger (cf. Marc 6,34)
ne s’arrête pas à une succession d’enseignements ! Les évangélistes
soulignent que Dieu-le-Fils s’inquiète aussi des contingences de la vie
quotidienne, de la nourriture du corps autant que de la nourriture spirituelle.
Aussi dit-il à Philippe : « Où pourrions-nous acheter du pain
pour qu’ils aient à manger ? » (Jean 6,5b) Le bon berger conduit
le troupeau vers « les prés d’herbe fraîche » (cf. Psaume
22[23]) Il a le souci de chacune de ses brebis.
Mais le Seigneur ne conçoit pas que le croyant soit passif, il est nécessaire
que le peuple participe pour que le miracle prenne tout son sens. Ainsi
le prophète Elisée ne retient pas à son seul profit les dons qui lui ont
été faits. En donnant les vingt pains d’orge et le sac de grains qui lui
ont été offerts, par cette action personnelle, il permet à cent personnes
de manger à leur faim et il en est resté ! (cf. 2Rois 4,42-44) Le
jeune garçon de l’évangile a apporté cinq pains et deux poissons, peut-être
voulait-il les offrir au Maître ou bien les avait-il prévus comme étant
son propre frichti mais il n’hésite pas à donner tout l’ensemble pour
que le Christ puisse nourrir cinq mille hommes, il y eut douze paniers
avec les restes ! Que ce soit dans le deuxième livre des Rois pour
Elisée ou dans l’évangile de Jean pour le Christ, dans les deux cas l’homme
aux vingt pains d’orge et sac de grains ou le jeune garçon aux cinq pains
d’orge et deux poissons, les donateurs restent anonymes : c’est l’abandon
de ce qu’ils possèdent qui est important pas les personnes qui font ce
geste.
C’est pour nous chrétiens d’aujourd’hui une grande leçon qui a différentes
applications en fonction de notre état d’esprit. Nous pouvons nous poser
la question de savoir ce que nous faisons pour que nos frères et sœurs
contemporains aient de quoi recevoir la nourriture spirituelle aussi bien
que la nourriture matérielle. Nous pouvons aussi réfléchir si, dans les
gestes que nous posons, nous cherchons une certaine gloire ou nous restons
discrets sans nous mettre en avant. Demandons au Seigneur la simplicité
de donner ce qui peut être utile au plus grand nombre et de savoir le
faire dans le secret nous n’aurons que Dieu comme témoin.
Père JeanPaul Bouvier
Prêtre retraité – curé émérite
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