5 avril 2007
Brigade Franco-Allemande
n°308
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Pro vobis et pro multis
Depuis près de vingt siècles cette formule, ou une expression équivalente,
est utilisée dans toutes les langues lors de la Consécration du pain et
du vin dont les substances deviennent celles du Corps et du sang de Note
Seigneur Jésus Christ.
Depuis près de vingt siècles, les chrétiens ont entendu cette formule
et ont pris pour eux ce pour vous. Si les croyants sont tous inclus
dans cette locution, à qui s’adresse donc le reste de la phrase pour
beaucoup ?
Deux interprétations sont possibles
La première, plus restrictive, est de considérer que le pour vous
ne s’adresse qu’aux participants locaux de la messe célébrée, c’est à
dire la petite communauté présente dans l’endroit au moment de la Consécration.
Le Pour beaucoup englobe alors tous les participants à la messe
dans d’autres lieux ou dans d’autres temps.
La seconde, plus universelle, considère que tous les participants à la
messe, où qu’ils soient, à quelque époque qu’ils aient vécu, sont inclus
dans le pour vous et que le pour beaucoup s’adresse à tous
les autres, ceux qui n’ont pas eu la chance de connaître le message du
Fils de Dieu, soit par ignorance (c’est le cas en particulier de tous
ceux qui ont vécu avant que le Fils se fût incarné) soit par refus ou
par méconnaissance.
Il y a un peu des deux, et cela est pour nous une source de méditation.
Chacun d’entre nous a la chance de pouvoir rencontrer son Seigneur et
de le reconnaître dans le pain et le vin eucharistiés. Cela nous conduit
à changer de vie et changer notre cœur pour ne pas être spirituellement
identiques avant et après avoir reçu le Corps du Christ, pour laisser
s’exprimer cet homme nouveau que nous avons revêtu au Baptême.
L’adoration que nous allons faire ce soir est une attente avec le Christ
au jardin de Gethsémani ; nous allons prier avec lui pour que la
volonté du Père soit faite. Mais dans notre vie quotidienne, ne sommes-nous
pas plutôt comme ces disciples qui se sont endormis ? Voire même
comme celui qui le trahit ?
« Montre-moi ta foi sans les œuvres, et moi, c’est par mes œuvres
que je te montrai ma foi » dit saint Jacques dans sa lettre.
Que ce soit notre devise.
Père JeanPaul Bouvier
Curé de la paroisse Militaire
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20 mars 2008
Brigade Franco-Allemande
n°364
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Le troisième sacrement est l'Eucharistie. Sa matière est le pain de
froment et le vin de raisin, auquel on doit mélanger avant la consécration
un tout petit peu d'eau. On y mélange de l'eau, parce que, selon le témoignage
des saints Pères et des Docteurs de l'Eglise mentionnés dans la discussion
précédente, on croit que le Seigneur lui-même a institué ce sacrement
avec du vin mélangé d'eau. Ensuite, parce que c'est une représentation
adéquate de la Passion du Seigneur. Car le bienheureux Alexandre, cinquième
pape après saint Pierre, dit «Dans l'oblation des mystères qui sont offerts
au Seigneur au cours de la solennité de la messe, on doit offrir seulement
en sacrifice du pain et du vin mélangé d'eau. Dans le calice du Seigneur,
on ne doit pas offrir seulement le vin ou seulement l'eau, mais les deux
mélangés, car on lit que ce sont les deux, le sang et l'eau, qui ont coulé
du côté du Christ [cf. Jn 19,34]» C'est aussi parce que l'effet de ce
sacrement, l'union du peuple chrétien au Christ, est adéquatement signifié.
L'eau, en effet, signifie le peuple ; suivant ce verset de l'Apocalypse
«Des eaux nombreuses... des peuples nombreux» [cf. Ap 17,15], et le pape
Jules, qui fut le deuxième après le bienheureux Sylvestre, dit «Le calice
du Seigneur doit être offert, selon le précepte canonique, avec un mélange
de vin et d'eau, parce que nous voyons que l'eau représente le peuple
et que le vin manifeste le sang du Christ. Donc, lorsque dans le calice
le vin est mélangé à l'eau, le peuple est uni au Christ et là foule des
fidèles intimement jointe à celui en qui elle croit», Comme la sainte
Eglise romaine, instruite par les bienheureux Apôtres Pierre et Paul,
tout comme les autres Eglises des Latins et des Grecs au milieu desquelles
brillèrent des lumières de sainteté et de savoir, gardèrent cet usage
depuis la naissance de l'Eglise et le gardent encore il ne semble nullement
convenable qu'une région particulière s'écarte de cette pratique universelle
si raisonnable. Nous décrétons donc que les Arméniens doivent aussi se
conformer à l'universalité du monde chrétien et que leurs prêtres doivent,
en offrant le calice, mélanger au vin un peu d'eau, comme on l'a dit.
La forme de ce sacrement, ce sont
les paroles du Sauveur par lesquelles il le réalisa. Le prêtre, en effet,
réalise ce sacrement en parlant au nom du Christ. Par la vertu des paroles,
la substance du pain est changée au corps du Christ et la substance du
vin à son sang. De telle manière cependant que le Christ tout entier est
contenu sous l'espèce du pain et tout entier sous l'espèce du vin ; sous
toute portion d'hostie et de vin consacrés, après la séparation des espèces,
le Christ est tout entier présent.
L'effet que ce sacrement produit dans l'âme de celui qui le reçoit
dignement est l'union de l'homme au Christ. Et parce que la grâce incorpore
l'homme au Christ et l'unit aux membres du Christ, il s'ensuit que ce
sacrement fait s'accroître la grâce en ceux qui le reçoivent dignement.
Tous les effets que la nourriture et la boisson matérielles produisent
sur la vie du corps soutien, accroissement, restauration et joie, ce
sacrement les opère pour la vie spirituelle. En lui, selon la parole du
pape Urbain, nous célébrons, pleins de reconnaissance, le souvenir de
notre Sauveur, nous sommes préservés du mal, nous sommes fortifiés dans
le bien et nous allons vers un accroissement de vertu et de grâce.
Bulle «Exultate Deo » d’Eugène IV (22 novembre
1439)
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9 avril 2009
Brigade Franco-Allemande
n°428
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La dernière coupe
Dans la Haggadah qui définit la liturgie de la soirée familiale du Séder,
c'est-à-dire le rituel de la Pâque juive, quatre coupes sont utilisées
les trois premières ont leur importance dans le cours du repas rappelant
la libération de l’esclavage d’Egypte ; la quatrième est le final
de cette célébration, après l’avoir bue les participants ne doivent plus
rien manger.
Saint Paul et saint Luc expliquent que c’est après le repas que Jésus
prend la coupe alors qu’aucune précision n’est donnée pour le pain. Ils
veulent donc insister sur la signification profonde de cette coupe spécifique.
Dans la bénédiction après avoir bu le vin de cette coupe, il est dit aujourd’hui :
« … Aie pitié, Eternel, notre Dieu de ton peuple Israël, de Jérusalem
ta ville, de Sion résidence de ta Majesté, de ton autel et de ton Temple.
Reconstruis bientôt et de nos jours Jérusalem, la ville sainte ;
veuille que nous y entrions et que nous jouissions de sa gloire… »
Jésus, puisqu’il présidait l’assemblée au Cénacle, a prononcé une bénédiction
en des termes équivalents ; mais dans la bouche du Fils de Dieu qui
va donner sa vie pour le pardon des hommes, ces paroles prennent une toute
autre dimension.
Parallèlement à ce qu’il a dit concernant le Temple qu’il se propose
de rebâtir en trois jours, faisant allusion à son propre corps, cette
bénédiction prend un retentissement tout différent qui ne peut être compris
qu’après la Résurrection. Notamment par l’auteur du IVème évangile, celui
qui arrivé au tombeau et voyant les linges « voit et croit »
(cf. Jean 20,7), lorsqu’il décrit la Jérusalem nouvelle descendant du
ciel où le Temple est inutile puisque Dieu lui-même y est présent. Cette
description conclut le livre de l’Apocalypse montrant qu’avec cette inauguration
tout est achevé (cf. Apocalypse 21)
Dans le même registre, les trois évangélistes synoptiques relatent que,
lors de la mort de Jésus, le voile de Temple se déchire de haut en bas
(cf. Matthieu 27,51 ; Marc 15,38 ; Luc 23,46) laissant le Saint
des saints à la vision de tous et montrant sa vacuité : Dieu n’est
plus présent au milieu des hommes. Le centurion de garde près du gibet
peut s’écrier « Vraiment cet homme était le Fils de Dieu »
(cf. Matthieu 27,53 ; Marc 15,38 ; Luc 23,47)
Ainsi dans la bénédiction finale de la célébration de la Cène, Jésus
essaie de faire comprendre à ses disciples que des temps nouveaux sont
arrivés avant que des signes plus évidents ne leur soient donnés afin
qu’ils aient le temps de se préparer au signe éclatant de la Résurrection.
Les évangélistes écrivant ensuite montrent les signes qu’ils n’avaient
pas compris au moment où ils étaient donnés
Père JeanPaul Bouvier
Aumônier de la Brigae Granco-Alleùande
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1er avril 2010
Fort Neuf de Vincennes
n°468
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Transmission
- C’est une loi perpétuelle : d’âge en âge vous la fêterez
(Exode 12,14)
- Je vous ai transmis ce que j’ai
reçu (1 Corinthiens 11,23)
- C’est un exemple que je vous ai donné (Jean 13,15)
Le christianisme, enraciné dans le judaïsme est basé sur la transmission
de la foi et d’une promesse faite à Abraham, transfigurée dans le sacrifice
sur Fils du Père. Une transmission d’événements qui ne sont pas fixés
dans le passé mais au contraire auxquels nous sommes invités à participer.
La fête juive de la Pâque souligne qu’aujourd’hui le croyant est
libéré de l’esclavage d’Egypte ; la célébration de la messe est une
participation au dernier repas de Jésus et de ses disciples au soir du
jeudi.
C’est un des éléments importants de la foi sacramentelle : nous
ne re-faisons pas ce qu’a fait Jésus, nous participons à son sacrifice
fait une fois pour toutes : faites ceci en mémoire de moi,
il ne s’agit pas de faire autre chose.
A chaque fois que les chrétiens se réunissent pour célébrer la messe
ils se retrouvent tous, à travers les siècles et à travers l’espace au
Cénacle de Jérusalem autour de Jésus livrant son Corps et son Sang pour
tous les hommes et femmes. Cet aspect est souligné dans les quatre prières
eucharistiques en priant pour les morts et les vivants après la transsubstantiation
du pain et du vin en Corps et Sang de Jésus Christ : nous sommes
avec eux, ils sont avec nous.
Si nous pouvons célébrer la messe de nos jours, plus ou moins librement
selon les pays, plus ou moins moqués ou critiqués selon l’air du temps,
nous le devons à tous ceux qui nous ont précédés et qui nous ont transmis
ces Sacrements qui nous configurent au Christ ; eux aussi ont connu
des persécutions, des menaces pour leur vie, des incompréhensions, des
moqueries, des dévalorisations…
Au moment où nous allons fêter la Résurrection du Christ, signe de notre
propre résurrection, nous avons ce devoir de transmission, non seulement
en enseignant mais aussi comme pour le lavement des pieds en étant des
exemples pour ceux qui nous entourent.
Ne laissons pas l’idéologie des sociétés modernes enfermer la foi chrétienne
dans une sphère qui ne serait que personnelle, nous sommes un peuple,
Le Peuple de Dieu acquis par le don que le Fils a fait de son Corps et
de son Sang.
Père JeanPaul Bouvier
aumônier de Vincennes
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21 avril 2011
Fort Neuf de Vincennes
n°532retour en haut de la page
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Alliance
Le thème de l’Alliance est récurent dans l’Ancien Testament. Celle qui
est promise à Abram : ‘J'institue mon alliance entre moi et toi,
et je t'accroîtrai extrêmement.’ (Genèse 17,2) est conclue (ch. 15)
avant même que Dieu change son nom d’Abram (= dont les pères sont importants)
en Abraham (= père d’une multitude ch. 17) Elle est centrale dans la foi
juive. Pourtant la première alliance que Dieu passe avec les hommes n’est
pas celle-là mais celle qu’Il passe avec Noé (cf. Genèse ch. 6 & ch.9)
et le signe qu’Il donne après le Déluge est l’arc-en-ciel, mais il le
définit comme ‘Tel est le signe de l'alliance que j'établis entre moi
et toute chair qui est sur la terre.’ (Genèse 9,17)
Jésus, au soir de la Cène, parle de son propre sang qui va être répandu
comme du sang de l’Alliance (Matthieu 26,26-29 ; Marc 14,22-25) et
une Alliance qui est Nouvelle (Luc 22,19-20 ; 1Corinthiens 11,23-25)
La nouveauté de cette Alliance réside dans le fait que le sang du Fils
est versé pour ‘la multitude’ et non plus seulement pour une descendance
précise : toute l’humanité est comprise dans cette Alliance.
La notion même d’alliance implique une réciprocité : deux parties
s’engagent l’une envers l’autre. Il n’en est rien lorsque Dieu passe une
Alliance avec les hommes, Lui seul s’engage, Il ne fait qu’indiquer ce
que le croyant doit faire s’il désire rester dans cette Alliance ;
la liberté de l’homme reste entière. Pour montrer ce choix de vie, à l’entrée
de la Terre Promise Dieu dit à son Peuple : « Je prends aujourd'hui
à témoin contre vous le ciel et la terre: je te propose la vie ou la mort,
la bénédiction ou la malédiction. Choisis donc la vie, pour que toi et
ta postérité vous viviez, aimant le Seigneur ton Dieu, écoutant
sa voix, t'attachant à lui; car là est ta vie, ainsi que la longue durée
de ton séjour sur la terre que le Seigneur a juré à tes pères,
Abraham, Isaac et Jacob, de leur donner. » (Deutéronome 30,19-20)
De la même manière, Jésus, le ‘Maître’ et ‘Seigneur’ donne
un exemple à ses Apôtres en leur lavant les pieds comme un serviteur,
les invitant à agir de la même façon, le véritable disciple se met au
service de ses frères et sœurs.
Lorsque aujourd’hui nous voyons l’évêque ou le prêtre laver les pieds
de quelques fidèles, nous pensons à ce geste du Christ. Pour les personnes
devant lesquelles il se met à genoux ceint du tablier de service c’est
souvent un moment de gène et de confusion et, comme l’Apôtre Pierre, elles
auraient tendance à dire : « Tu ne me laveras pas les pieds,
non jamais ! » Pour le célébrant c’est un moment spirituel
important, il s’identifie au Christ serviteur de façon tangible en se
montrant comme pasteur attentif au bien du troupeau.
Ce n’est pas une action théâtrale mais bien un moment spirituel important
pour la communauté d’être ainsi servie par son pasteur. Vivons-le pleinement.
Père JeanPaul Bouvier
Aumônier du Fort Neuf de Vincennes
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5 avril 2012
Fort Neuf de Vincennes
n°602
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Servir
Le IVème évangéliste ne décrit pas la Cène avec l’instauration de l’eucharistie,
il sait que cela est écrit et transmis par d’autres auteurs et lu dans
toutes les communautés chrétiennes ; par contre il relate cet épisode
surprenant : le Seigneur lave les pieds de ses disciples ! C’est
un signe de bienvenue de la part du maître de maison, mais cette tâche
est habituellement exécutée par un esclave.
La réaction de Simon-Pierre est tout à fait compréhensible, il ne peut
imaginer que le Seigneur effectue ce travail comme s’il était son serviteur :
c’est à lui de servir Jésus et non le contraire. Lorsque Jésus lui dit
que c’est un passage obligé pour avoir part au Royaume, il se résigne
à se laisser faire et demande même plus.
Devant les disciples apparemment silencieux après cette besogne, Jésus
leur explique qu’il n’y a pas d’action qui soit humiliante si elle est
faite pour servir ses frères et il leur demande d’en faire autant. Non
pas dans le sens littéral en lavant les pieds de tous ceux qu’ils vont
rencontrer mais dans le sens profond de se mettre au service des autres
en fonction de leurs besoins propres.
De nos jours, les chrétiens sont presque toujours gênés lorsqu’ils sont
pressentis pour que le célébrant leur lave les pieds – de façon assez
symbolique – pendant la célébration de la Cène. Face à cela, l’évêque
ou le prêtre est heureux de faire à ces personnes ce que le Christ a fait
à ses disciples, c’est un acte où il se sent ‘in personna Christi’
de façon plus tangible que lorsqu’il préside un Sacrement : il se
met au service des hommes comme le Christ s’y est mis.
Toute la Bonne Nouvelle conduit à l’amour de tous les frères et l’évangile
de saint Jean rapporte la phrase de Jésus : « Je vous donne
un commandement nouveau: vous aimer les uns les autres; comme je vous
ai aimés, aimez-vous les uns les autres. » (Jean 13,34) et saint
Matthieu indique la voie de la perfection : « Car si vous
aimez ceux qui vous aiment, quelle récompense aurez-vous ? Les publicains
eux-mêmes n'en font-ils pas autant ? Et si vous réservez vos saluts
à vos frères, que faites-vous d'extraordinaire ? Les païens eux-mêmes
n'en font-ils pas autant ? Vous donc, vous serez parfaits comme votre
Père céleste est parfait. » (Matthieu 5,46-48)
L’attitude de serviteur que Jésus prend avec ses Apôtres, leur fait comprendre
qu’il n’y a pas parmi les hommes de personnes supérieures aux autres :
Lui qui est Fils de Dieu « n'a pas usé de son droit d'être traité
comme un dieu mais il s'est dépouillé prenant la forme d'esclave. Devenant
semblable aux hommes et reconnu à son aspect comme un homme il s'est abaissé
devenant obéissant jusqu'à la mort à la mort sur une croix. »
(Philippiens 2,6-8)
En sortant de l’église, essayons de graver dans notre esprit : « Car
c'est un exemple que je vous ai donné, pour que vous fassiez, vous aussi,
comme moi j'ai fait pour vous »
Père JeanPaul Bouvier
Aumônier du Fort Neuf de Vincennes
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28 mars 2013
Secteur Vermandois
n°668
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C’est une loi perpétuelle
Dans le livre de l’Exode, Dieu présente la Pâque, célébration de la sortie
d’Egypte, comme une fête perpétuelle, c'est-à-dire quelque chose de permanent
qui dure toujours de façon ininterrompue, qui ne cesse pas. La prière
de la Pâque juive, la ‘Haggadah’, fait référence à la promesse
faite à Abraham et à sa descendance : « Mon père était un
araméen errant… » regroupant ainsi l’ensemble du Peuple de Dieu
à travers les siècles depuis les origines.
En célébrant la Pâque avec ses disciples, Jésus accomplit – rend complète
– cette loi perpétuelle en leur disant après le partage du pain et du
vin « Faites ceci en mémoire de moi ! » ‘Faire
mémoire’ est profondément différent d’un simple souvenir, comme pour
la libération d’Egypte il s’agit d’une actualisation dans la vie même
du croyant. Jésus ne dit pas ‘Refaites ceci’ : il leur donne
le pouvoir de faire à sa place (‘in personna Christi’)
pour que tous les croyants qui ont vécu, vivent et vivront son sacrifice
soient présents autour de lui lors de la dernière Cène : « Chaque
fois en effet que vous mangez ce pain et que vous buvez cette coupe, vous
annoncez la mort du Seigneur, jusqu'à ce qu'il vienne. » (1Corinthiens
11,26)
Ainsi lorsque nous participons à la messe nous sommes transportés dans
le Cénacle avec les Apôtres, nous partageons le Corps et le Sang du Seigneur
et nous l’entendons nous dire : « Faites ceci en mémoire
de moi ! » mais en même temps nous recevons l’appel qui
nous est lancé pour nous mettre au service de nos frères : « Si
donc je vous ai lavé les pieds, moi le Seigneur et le Maître, vous aussi
vous devez vous laver les pieds les uns aux autres. Car c'est un exemple
que je vous ai donné, pour que vous fassiez, vous aussi, comme moi j'ai
fait pour vous. » (Jean 13,14-15)
La Pâque juive, mémorial perpétuel de la libération de l’esclavage d’Egypte
nécessite le sacrifice tous les ans d’un agneau sans défaut par les prêtres
dans le Temple de Jérusalem ; elle est transfigurée par le mémorial
du Sacrifice du Fils unique de Dieu, le grand-Prêtre siégeant dans la
gloire, qui offre perpétuellement son propre Corps et son propre Sang
au Père dans le sanctuaire céleste pour l’expiation des péchés des hommes
(cf. l’épître aux Hébreux)
Les messes auxquelles nous participons ne sont pas des documentaires
sur ce qui s’est passé il y vingt siècles, c’est l’événement lui-même
auquel nous sommes invités à participer comme tous les disciples du Christ
qui nous ont précédés. Avec eux, nous pouvons témoigner : « Jésus,
sachant que son heure était venue de passer de ce monde vers le Père,
ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu'au bout. »
(Jean 13,1)
Père JeanPaul Bouvier
Curé in solidum du secteur Vermandois
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17 avril 2014
Secteur Vermandois
n°744
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Pas seulement les pieds !
L’indignation de Pierre est tout à son honneur, les autres disciples
semblent s’être laissés faire dans comprendre davantage l’attitude du
Maître. Mais Simon-Pierre avait reconnu dans l’action de Jésus le Messie
attendu par le peuple : « Et vous, leur dit-il, qui dites-vous
que je suis ? Simon Pierre répondit: Tu es le Christ, le Fils du
Dieu vivant. » (Matthieu 16,15-16) Il refuse totalement que Celui
qui vient au Nom du Seigneur (cf. Psaume 118,26 & Matthieu 21,9) lui
lave les pieds comme un serviteur.
A cette indignation correspond son enthousiasme lorsque le Maître lui
dit que c’est un passage nécessaire pour avoir part au Royaume :
« Alors, Seigneur, pas seulement les pieds, mais aussi les mains
et la tête ! » (13,9) Il est prêt à supporter cela pour être toujours
avec le Christ. Mais il ne peut envisager que la mission du ‘Fils du
Dieu vivant’ s’achève par une condamnation à mort : « A
Dieu ne plaise, Seigneur ! Cela ne t’arrivera pas. » (Matthieu
16,22b)
Les chrétiens sont à l’image de Pierre, ils oscillent entre une foi exaltée
prête à déplacer les montagnes et une réticence à considérer le Christ
serviteur lui qui, par sa nature divine, ne peut être que servi. Une certaine
conception de l’‘Eglise triomphante’ s’oppose ainsi à une conception
de l’‘Eglise des pauvres’ tout aussi exclusive. Dans ce passage
du IVème évangile, Le Fils de Dieu montre à ses disciples que c’est dans
le service qu’il est triomphant. Reconnaître le Christ dans la personne
qui me sert est tout aussi important que de le reconnaître dans sa présence
réelle de l’Eucharistie.
La pointe de ce texte est double dans des sens qui pourraient paraître
antinomiques. L’exemple que nous donne Jésus est le service : « C'est
un exemple que je vous ai donné afin que vous fassiez, vous aussi, comme
j'ai fait pour vous. » (13,15) mais
parallèlement à cela, il ne faut pas oublier l’exemple de Pierre et savoir
accepter d’être servi : « pas seulement les pieds ! »
Donner l’occasion à d’autres la joie d’être configurés au Christ serviteur
est aussi un service qu’il ne faut ni négliger ni sous-estimer.
Etre serviteur au nom du Christ semble plus estimable, mais avoir l’humilité
d’accepter d’être servi est tout aussi remarquable. Le Christ est tout
aussi présent dans celui qui sert aux yeux de celui qui est servi que
dans celui qui est servi aux yeux du serviteur : « toutes
les fois que vous avez fait ces choses à l’un de ces plus petits de mes
frères, c’est à moi que vous les avez faites. » (Matthieu 25,40)
Père JeanPaul Bouvier
Curé in solidum du secteur Vermandois
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24 mars 2016
Secteur Vermandois
n°868
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L’Alliance Nouvelle et Eternelle
Les alliances sont nombreuses dans l’Ancien Testament :
- Avec le premier couple, avant même leur création : « Faisons
l’homme à notre image, selon notre ressemblance. Qu’il soit le maître
des poissons de la mer, des oiseaux du ciel, des bestiaux, de toutes
les bêtes sauvages, et de toutes les bestioles qui vont et viennent
sur la terre » (Genèse 1,26)
- Avec Caïn après le meurtre d’Abel : « « Si quelqu’un
tue Caïn, Caïn sera vengé sept fois. » Et le Seigneur mit un signe
sur Caïn pour le préserver d’être tué par le premier venu qui le trouverait. »
(Genèse 4,15)
- Avec Noé après le déluge : « Voici le signe de l’alliance
que j’établis entre moi et vous, et avec tous les êtres vivants qui
sont avec vous, pour les générations à jamais » (Genèse 9,12)
- Avec Abraham : « Moi, voici l’alliance que je fais avec
toi : tu deviendras le père d’une multitude de nations. Tu ne seras
plus appelé du nom d’Abram, ton nom sera Abraham. » (Genèse
17,4-5)
- Avec son Peuple : « si vous écoutez ma voix et gardez
mon alliance, vous serez mon domaine particulier parmi tous les peuples,
car toute la terre m’appartient » (Exode 19,5) et renouvelée
plusieurs fois e.g. « Je vous ai fait monter hors d’Egypte,
et je vous ai amenés dans le pays que j’ai juré à vos pères de vous
donner. J’ai dit : Jamais je ne romprai mon alliance avec vous. »
(Juges 2,1)
L’Alliance instituée par le Fils est nouvelle par la nature du Sacrifice
qui est offert : ce n’est plus le sang et le corps de l’agneau pascal
tel qu’il est décrit dans le livre de l’Exode : « Ce sera
une bête sans défaut, un mâle, de l’année. Vous prendrez un agneau ou
un chevreau. […] on l’immolera au coucher du soleil. On prendra du sang,
que l’on mettra sur les deux montants et sur le linteau des maisons où
on le mangera. On mangera sa chair cette nuit-là » (Exode 12,5…8)
Désormais c’est le Corps et le Sang de Dieu qui est partagé par les croyants,
le Fils est immolé et son sang macule les bois vertical et horizontaux
de la croix, signe que l’humanité est sauvée de la mort et du péché comme
le signe sur la porte avait permis aux fils ainés des hébreux d’être épargnés.
En célébrant la Pâque avec ses disciples, le Christ inaugure la Nouvelle
Alliance par un réel sacrifice : les juifs partageaient avec les
prêtres la viande de l’animal offert en sacrifice qui avait été grillé
sur l’autel du Temple. En célébrant le sacrifice du Christ, les chrétiens
partagent le Corps de Celui qui est préside la Jérusalem céleste :
« Il est digne, l’Agneau immolé, de recevoir puissance et richesse,
sagesse et force, honneur, gloire et louange » (Apocalypse 5,12)
Vivants dans cette Nouvelle Alliance, alimentés par le Corps de ‘l’Agneau
Immolé’, inspirés par l’Esprit, les chrétiens suivent l’exemple donné
par leur Maître et sont serviteurs dans le monde comme le rappelle saint
Jean par l’épisode du lavement des pieds. Cette Semaine Sainte relancera
le désir de partager cette Bonne Nouvelle à toutes les nations.
Père JeanPaul Bouvier
Curé in solidum du secteur Vermandois
administrateur des paroisses de Nesle et Athies
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13 avril 2017
Paroisses Nesle & Athies
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n°933
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La ceinture aux reins, les sandales aux pieds, le bâton
à la main
Ce sont là les indications que le Seigneur donne à Moïse pour manger
la Pâque : il faut que le peuple soit prêt à partir dans la hâte
dès que Pharaon aura donné l’ordre du départ, après la mort de tous les
premiers-nés d’Egypte. Dieu ajoute encore une prescription pour l’avenir :
« Ce jour-là sera pour vous un mémorial. » (Exode 12,14)
A l’époque de Jésus, une relecture a été faite de ce texte. Le peuple
juif a bien compris que c’est le mémorial qui était important en non pas
le fait de se préparer à quitter en toute hâte ‘ceinture aux reins,
sandales aux pieds, bâton à la main’ (v.11) le pays de l’esclavage ;
il ne s’agit de refaire tous les faits et gestes de la nuit de Pâque en
Egypte mais de faire mémoire de la libération que Dieu leur a donnée par
son amour, n’a-t-il pas dit à Moïse depuis le cœur du buisson ardent :
« Le cri des fils d’Israël est parvenu jusqu’à moi, et j’ai vu
l’oppression que leur font subir les Égyptiens. » (Exode 3,9)
Dans cet esprit, les disciples demandent à Jésus : « Où
veux-tu que nous te fassions les préparatifs pour manger la Pâque ? »
(Matthieu 26,17) Ils pensaient au rituel habituel du mémorial de la Sortie
d’Egypte ; mais Jésus, comme dans sa prédication, va développer la
Parole du Père dans un sens inattendu et, par l’exemple du lavement des
pieds, il leur montre qu’il n’y a rien de plus grand que d’être le serviteur
de tous, autre façon d’affirmer le leitmotiv qui sous-tend le IVème évangile :
‘Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés !’
Cet évangile, écrit beaucoup plus tardivement que les autres, ne revient
pas sur l’institution de l’Eucharistie qui est sans doute déjà célébrée
régulièrement par les chrétiens comme en témoigne saint Luc : « Ils
étaient assidus à l’enseignement des Apôtres et à la communion fraternelle,
à la fraction du pain et aux prières. » (Actes 2,42) mais il
l’évoque en rappelant l’importance de la réception du Corps et du Sang
du Christ : « Celui qui mange ma chair et boit mon sang a
la vie éternelle ; et moi, je le ressusciterai au dernier jour. »
(Jean 6,54)
Au cœur de la Semaine Sainte, célébrer le double mémorial de la libération
de l’Egypte et l’institution de l’Eucharistie invite chacun d’entre nous
à mesurer les dons que le Père met en nous : libérés de l’esclavage
du péché par l’unique sacrifice du Fils, promis à la résurrection comme
le Fils, nous recevons l’Esprit qui nous donne le discernement nécessaire
pour voir l’action du Père, du Fils et du Saint Esprit dans le monde et
en nous. Pour être fidèle à Dieu, sa Parole nous guide : « Tu
ne voulais ni offrande ni sacrifice, tu as ouvert mes oreilles ; tu ne
demandais ni holocauste ni victime, alors j'ai dit : « Voici, je viens.
« Dans le livre, est écrit pour moi ce que tu veux que je fasse »
(Psaume 39[40],7-9)
Père JeanPaul Bouvier
Curé de la paroisse Notre Dame de Nesle
& Modérateur de la paroisse sainte Radegonde d’Athies
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29 mars 2018
Paroisses Nesle & Athies
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n°1001
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Le partage de l’Agneau Pascal
Le Seigneur donne ainsi ses consignes à son peuple pour la fête de Pâque :
« Si la maisonnée est trop peu nombreuse pour un agneau, elle
le prendra avec son voisin le plus proche, selon le nombre des personnes. »
(Exode 12,4) Ce qui resterait devra être brûlé par le feu (v.10). Le sang
de cet agneau est placé sur le linteau et les montants de la porte (v.7)
et il devient le signe par lequel le peuple est protégé de l’épée de l’ange
exterminateur (v.13).
Ces quelques lignes de prescriptions pour la façon de consommer l’agneau
pascal se lisent différemment avec la Passion du Fils de Dieu. Le IVème
évangile nous rappelle dans la bouche de Jésus : « Amen,
amen, je vous le dis : Moi, je suis la porte des brebis. »
(Jean 10,7). Les traces de sang de l’agneau sur les portes des hébreux
en Egypte : en haut, à gauche et à droite évoquent tout de suite
les traces du sang du Christ sur la Croix : à la tête, au poignet
gauche et au poignet droit. Dieu le Fils est cette garantie par rapport
à l’ange exterminateur qui voit le signe dont nous sommes marqués et qui
passe sans nous entraîner à la mort du péché.
L’institution de l’Eucharistie transmise par saint Paul dans la première
lettre aux Corinthiens n’est pas seulement une évocation de ce qui s’est
passé la veille de la crucifixion, d’un adieu à aux disciples, c’est une
mémoire, c'est-à-dire une présence réelle de chaque participant dans la
salle du Cénacle, notre présence autour de la table. « La maisonnée
est trop peu nombreuse » et nous partageons le Corps du Christ,
de ‘l’Agneau Immolé’ de l’Apocalypse, avec nos plus proches voisins,
puisque tous sont invités au festin des noces de l’Agneau.
La sortie de l’esclavage en Egypte du peuple de Dieu est une préfiguration
de notre propre sortie de l’esclavage du péché sur une terre étrangère :
comme lui nous sommes appelés à aller dans la Terre Promise où le Seigneur
Jésus, l’Agneau de Dieu par excellence. En mangeant le Corps du Christ
nous avons revêtu la tenue de service, prêts à suivre l’Esprit qui nous
entraine vers le Père.
Les signes qui sont donnés dans le livre de l’Exode se trouvent dévoilées
dans la Passion et la Résurrection ; Le sacrifice annuel de l’agneau
pour le repas pascal est devenu caduc parce que le Fils présente perpétuellement
le sacrifice de son Corps au Père dans le Temple Céleste et il est « avec
nous tous les jours jusqu’à la fin du monde. » (Matthieu 28,20)
En offrant son Corps sacrifié, il présente aussi tous les membres de son
Corps Mystique, l’Eglise.
Père JeanPaul Bouvier
Curé de la Paroisse Notre Dame de Nesle
& modérateur de la Paroisse sainte Radegonde d’Athies
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18 avril 2019
Paroisses Nesle & Athies
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n°1075
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Le Corps livré – le Sang versé
Quelques années après la mort et la Résurrection du Christ, saint Paul
rappelle dans sa lettre aux Corinthiens que, lors de son passage parmi
eux, il leur a transmis ce que le Seigneur Jésus a donné aux Apôtres en
célébrant la Pâque avec eux. Lui-même, Paul, avait reçu cette instruction
de « faire cela en mémoire » de la part de ceux qui lui
avaient enseigné l’Evangile. Dès les premières années de l’Eglise, ce
commandement du Seigneur Jésus est au centre de la vie chrétienne :
« Ils étaient assidus à l’enseignement des Apôtres et à la communion
fraternelle, à la fraction du pain et aux prières. » (Actes 2,42).
Saint Luc, dans le récit de compagnons d’Emmaüs (cf. Luc 24,13-35), donne
déjà le schéma de la messe : accueil du fidèle dans ses difficultés,
Parole et explication, partage du Pain Rompu dans lequel le Christ est
reconnu, envoi en mission. Ce déroulement a été transmis à travers le
temps et l’espace comme faisant partie intégrante de la Bonne Nouvelle
du Salut ; quel que soit le pays ou la langue la succession des séquences
est respectée dans sa progression.
L’évangile de saint Jean, écrit bien plus tard, connait la tradition
et la place dans la prédication de Jésus : « Moi, je suis
le pain vivant, qui est descendu du ciel : si quelqu’un mange de
ce pain, il vivra éternellement. Le pain que je donnerai, c’est ma chair,
donnée pour la vie du monde. » (Jean 6,51) et lors du dernier
repas avec ses disciples l’évangéliste indique la mission qui découle
de ce partage de la ‘chair’ du Christ : « A ceci,
tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples : si vous avez de
l’amour les uns pour les autres. » (Jean 13,35)
Les paroles du Christ « Faites cela en mémoire de moi »
ne s’appliquent pas dans le sens de ‘refaire’ le Sacrifice de sa
vie offerte pour le salut du monde mais à l’ordre qu’il donne à ses disciples
de manger son Corps et de boire son Sang. Le sacrifice est unique, il
n’y a qu’un seul ‘Agneau immolé, qui reçoive puissance et richesse,
sagesse et force, honneur, gloire et louange.’ (cf. Apocalypse 6,12)
Ainsi par notre communion à l’autel, nous sommes avec les disciples le
soir du Jeudi Saint : nous mangeons le Corps et nous buvons le Sang
que le Christ a consacrés dans le Cénacle ; ils sont rendus sacramentellement
présents dans l’hostie et la coupe par la prière de l’Eglise rassemblée
qui fait cela en mémoire de Dieu-le-Fils comme il nous demande.
Père JeanPaul Bouvier
Curé de la Paroisse Notre Dame de Nesle
& modérateur de la Paroisse sainte Radegonde d’Athies
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9 avril 2020
Paroisses Nesle & Athies
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n°1141
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CoVid-19 :
26ème jour sans assemblées
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Les églises peuvent fermer
Nos cœurs restent ouverts
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Ils regarderont vers Celui
qu’ils ont transpercé (Zacharie 12,10)
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Je vous ai transmis
« Frères, moi, Paul, j’ai moi-même reçu ce qui vient du Seigneur,
et je vous l’ai transmis : la nuit où il était livré, le Seigneur Jésus
prit du pain, puis, ayant rendu grâce, il le rompit, et dit : ‘Ceci est
mon corps, qui est pour vous. Faites cela en mémoire de moi.’ Après le
repas, il fit de même avec la coupe, en disant : ‘Cette coupe est la nouvelle
Alliance en mon sang. Chaque fois que vous en boirez, faites cela en mémoire
de moi.’ Ainsi donc, chaque fois que vous mangez ce pain et que vous buvez
cette coupe, vous proclamez la mort du Seigneur, jusqu’à ce qu’il vienne. »
(1Corinthiens 11,23-26)
Saint Paul exprime ici le fond même de la foi chrétienne : le Sacrifice
du Christ, fait une fois pour toutes, auquel tous ceux qui croient en
Jésus-Christ, Fils éternel du Père, participent ‘en mémoire de Lui’.
Ce Sacrifice qui est une annonce de la mort et de la Résurrection du Sauveur.
D’autres détails sont donnés sur la façon de vivre ‘en mémoire’
ce dîner de la Cène. dès le récit des compagnons d’Emmaüs (cf. Luc 24,13ss)
une succession de célébrations est présentée : rencontre du Christ
dans la vie quotidienne, explication de toute l’Ecriture, partage du pain,
envoi en mission pour proclamer l’évangile.
Saint Paul expliquait la Parole et ne pouvait s’arrêter : « Le
premier jour de la semaine, nous étions rassemblés pour rompre le pain,
et Paul, qui devait partir le lendemain, s’entretenait avec ceux qui étaient
là. Il continua de parler jusqu’au milieu de la nuit, » (Actes
20,7) à tel point qu’un jeune garçon finit par s’endormir (v.9)
Tout au long des siècles cette succession a été conservée même si la
forme a pu varier, le fond est resté dans l’esprit. Chaque église avait
sa façon particulière de célébrer ce mystère mais la transmission était
respectée.
Saint Paul souligne bien qu’il ne s’agit pas d’une ‘formule magique’
mais d’un acte de foi : les participants sont bien le soir même de
la Cène autour de Jésus et des Apôtres et cet acte de foi a pour but d’annoncer
le retour du Christ. Dans la Gloire.
Si nous pouvons célébrer la messe de nos
jours, plus ou moins librement selon les pays, plus ou moins moqués ou
critiqués selon l’air du temps, nous le devons à tous ceux qui nous ont
précédés et qui nous ont transmis ces Sacrements qui nous configurent
au Christ. Notre devoir est de continuer cette chaine ininterrompue afin
que nous puissions dire avec fierté : « j’ai moi-même
reçu ce qui vient du Seigneur, et je vous l’ai transmis »
Père JeanPaul Bouvier
Curé de Notre Dame de Nesle
Modérateur de sainte Radegonde
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1er avril 2020
Paroisses Nesle & Athies
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n°1208
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Comprenez-vous ce que je viens de faire ?
Le IVème évangéliste ne décrit pas la Cène avec l’instauration de l’eucharistie,
il sait que cela est écrit et transmis par d’autres auteurs et lu dans
toutes les communautés chrétiennes ; par contre il relate cet épisode
surprenant : le Seigneur lave les pieds de ses disciples ! C’est
un signe de bienvenue pour un arrivant dans une maison, mais cette tâche
est habituellement exécutée par un esclave.
La réaction de Simon-Pierre est tout à fait compréhensible, il ne peut
imaginer que le Seigneur effectue ce travail comme s’il était son serviteur :
c’est à lui de servir Jésus et non le contraire. Lorsque Jésus lui dit
que c’est un passage obligé pour avoir part au Royaume, il se résigne
à se laisser faire et demande même plus.
Devant les disciples apparemment silencieux après cette besogne, Jésus
leur explique qu’il n’y a pas d’action qui soit humiliante si elle est
faite pour servir ses frères et il leur demande d’en faire autant. Non
pas dans le sens littéral en lavant les pieds de tous ceux qu’ils vont
rencontrer mais dans le sens profond de se mettre au service des autres
en fonction de leurs besoins propres.
De nos jours, les chrétiens sont presque toujours gênés lorsqu’ils sont
pressentis pour que le célébrant leur lave les pieds – de façon assez
symbolique – pendant la célébration de la Cène. Face à cela, l’évêque
ou le prêtre est heureux de faire à ces personnes ce que le Christ a fait
à ses disciples, c’est un acte où il se sent ‘in personna Christi’
de façon plus tangible encore que lorsqu’il préside un Sacrement :
il se met au service des hommes comme le Christ s’y est mis. Cette année,
comme l’année dernière, cette identification ne nous est pas permise.
Toute la Bonne Nouvelle conduit à l’amour de tous les frères et l’évangile
de saint Jean rapporte la phrase de Jésus : « Je vous donne
un commandement nouveau: vous aimer les uns les autres; comme je vous
ai aimés, aimez-vous les uns les autres. » (Jean 13,34) et saint
Matthieu indique la voie de la perfection : « Car si vous
aimez ceux qui vous aiment, quelle récompense aurez-vous ? Les publicains
eux-mêmes n'en font-ils pas autant ? Et si vous réservez vos saluts
à vos frères, que faites-vous d'extraordinaire ? Les païens eux-mêmes
n'en font-ils pas autant ? Vous donc, vous serez parfaits comme votre
Père céleste est parfait. » (Matthieu 5,46-48)
L’attitude de serviteur que Jésus prend avec ses Apôtres, leur fait comprendre
qu’il n’y a pas parmi les hommes de personnes supérieures aux autres :
Lui qui est Fils de Dieu « n'a pas usé de son droit d'être traité
comme un dieu mais il s'est dépouillé prenant la forme d'esclave. Devenant
semblable aux hommes et reconnu à son aspect comme un homme il s'est abaissé
devenant obéissant jusqu'à la mort à la mort sur une croix. »
(Philippiens 2,6-8)
En sortant de l’église, essayons de graver dans notre esprit : « Car
c'est un exemple que je vous ai donné, pour que vous fassiez, vous aussi,
comme moi j'ai fait pour vous »
Père JeanPaul Bouvier
Curé de la Paroisse Notre Dame de Nesle
& modérateur de la Paroisse sainte Radegonde d’Athies
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28 mars 2024
Maison Marie-Thérèse
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n°1375
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La coupe d’Elie
Dans la Haggadah qui définit la liturgie de la soirée familiale du Séder,
c'est-à-dire le rituel de la Pâque juive, quatre coupes sont utilisées
les trois premières ont leur importance dans le cours du repas rappelant
la libération de l’esclavage d’Egypte. A la fin du repas on chante le Hallèl et on remplit la quatrième
coupe, le partage de cette coupe manifeste le final de cette célébration,
après l’avoir bue les participants ne doivent plus rien manger ni boire.
Il y a encore une cinquième coupe de vin, qu'on appelle celle du Prophète
Elie et qui reste intacte sur la table pendant toute la célébration. Elle
porte ce nom parce que la question, si elle est obligatoire ou non, sera
décidée « Quand Elie viendra » : c’est la coupe
du Messie !
Saint Paul et saint Luc expliquent que c’est après
le repas que Jésus prend la coupe alors qu’aucune précision n’est donnée
pour le pain. Ils veulent donc insister sur la signification profonde
de cette coupe spécifique. Dans la bénédiction après avoir bu le vin de
cette coupe, il est dit aujourd’hui : « … Aie pitié, Eternel,
notre Dieu de ton peuple Israël, de Jérusalem ta ville, de Sion résidence
de ta Majesté, de ton autel et de ton Temple. Reconstruis bientôt et de
nos jours Jérusalem, la ville sainte ; veuille que nous y entrions
et que nous jouissions de sa gloire… »
Jésus, puisqu’il présidait l’assemblée au Cénacle, a prononcé une bénédiction
en des termes équivalents ; mais dans la bouche du Fils de Dieu qui
va donner sa vie pour le pardon des hommes, ces paroles prennent une autre
dimension. La coupe d’Elie est bue, la prophétie est réalisée, le Messie
est venu : il est là !
Parallèlement à ce qu’il a dit concernant le Temple qu’il se propose
de rebâtir en trois jours, faisant allusion à son propre corps, cette
bénédiction prend un retentissement tout différent qui ne peut être compris
qu’après la Résurrection. Notamment par l’auteur du IVème évangile, celui
qui arrivé au tombeau et voyant les linges « voit et croit »
(cf. Jean 20,7), lorsqu’il décrit la Jérusalem nouvelle descendant du
ciel où le Temple est inutile puisque Dieu lui-même y est présent. Cette
description conclut le livre de l’Apocalypse montrant qu’avec cette inauguration
tout est achevé (cf. Apocalypse 21)
Dans le même registre, les trois évangélistes synoptiques relatent que,
lors de la mort de Jésus, le voile de Temple se déchire de haut en bas
(cf. Matthieu 27,51 ; Marc 15,38 ; Luc 23,46) laissant le Saint
des saints à la vision de tous et montrant sa vacuité : Dieu n’est
plus présent au milieu des hommes. Le centurion de garde près du gibet
peut s’écrier « Vraiment cet homme était le Fils de Dieu »
(cf. Matthieu 27,53 ; Marc 15,38 ; Luc 23,47)
Ainsi dans la bénédiction finale de la célébration de la Cène, Jésus
essaie de faire comprendre à ses disciples que des temps nouveaux sont
arrivés avant que des signes plus évidents ne leur soient donnés afin
qu’ils aient le temps de se préparer au signe éclatant de la Résurrection.
Les évangélistes écrivant ensuite montrent les signes qu’ils n’avaient
pas compris au moment où ils étaient donnés
Père JeanPaul Bouvier
Prêtre retraité – curé émérite
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