jour 4
Mardi 3 novembre 2020
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Humilité
Philippiens 2, 5-11 - PSAUME 21 (22), 26b-27, 28-29,
31-32) - Luc 14,15-24
Saint Paul nous donne la clef de la véritable humilité : estimer
les autres supérieurs à soi et se préoccuper davantage des autres que
de soi-même.
Il développe ensuite cette idée en faisant remarquer à ses correspondants
combien l’humilité du Christ a été importante en venant parmi nous, homme
parmi les hommes : « Il n’a pas jugé bon de revendiquer son
droit d’être traité à l’égal de Dieu ! »
Ainsi en est-il du chrétien, quel que soit sa qualité, son intelligence,
ses connaissances, il ne doit pas s’arroger le droit d’être traité de
façon différente des autres hommes et femmes ; se prévaloir des dons
qu’il a reçus pour dominer les autres et les rabaisser ne saurait être
un comportement compatible avec l’Evangile.
Toutefois il ne faut pas confondre humilité et humiliation ! L’humilité
est une vertu qui met en lumière les limites de chacun et la reconnaissance
de ses propres faiblesses ; l’humiliation consiste à rabaisser sciemment
une personne ou soi-même de façon à mettre cet autre dans un état d’infériorité
et de dépendance. Dieu veut que l’Homme soit debout, fier de sa condition
humaine et non avili, prosterné ou courbé. Cette volonté de Dieu est marquée
dès le commencement lors de la Création du monde : « Dieu
créa l'homme à son image, à l'image de Dieu il le créa, homme et femme
il le créa. Dieu les bénit et leur dit: "Soyez féconds, multipliez,
emplissez la terre et soumettez-la. » (Genèse 1,2-28) et pour
le sauver il envoie son propre Fils : « Et le Verbe s'est
fait chair et il a campé parmi nous, et nous avons contemplé sa gloire,
gloire qu'il tient du Père comme Unique-Engendré, plein de grâce et de
vérité » (Jean 1,14)
S’il n’y a pas lieu d’humilier l’homme et la femme, ‘image de Dieu’
chaque homme et chaque femme doit avoir l’humilité de rendre grâce pour
ce qu’ils sont avec l’émerveillement du psalmiste : « Qu'est-ce
que l'homme, pour que tu le connaisses, Seigneur, le fils de l'homme,
pour que tu comptes avec lui ? »
(Psaume 143,3)
Reconnaître ce que je suis entraîne aussi la reconnaissance de que l’autre
est : une personne humaine aimée du Père, sauvée par le Fils et inspirée
par l’Esprit Saint. Le regard que je porte sur mon prochain est donc radicalement
changé, je ne suis plus en ‘concurrence’ avec lui mais dans une
même communion : c’est un frère – une sœur – de qui je dois me préoccuper.
L’exemple du Christ qui, à la veille de sa Passion, lave les pieds de
ses disciples doit toujours rester dans la mémoire du chrétien suivant
la demande même de Jésus : « Car c'est un exemple que je
vous ai donné, pour que vous fassiez, vous aussi, comme moi j'ai fait
pour vous. » (Jean 13,15)
Dans un monde de plus en plus individualiste et protectionniste, notre
devoir du chrétien est de montrer que l’‘Autre’ n’est pas à écraser
comme un ennemi mais à aider à se relever comme un frère le ferait pour
un frère.
Père JeanPaul Bouvier
Curé de Notre Dame de Nesle
Administrateur de sainte Radegonde
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jour 5
Mercredi 4 novembre 2020
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Commencer par s’asseoir
Philippiens 2, 12-18 – PSAUME 26 (27), 1,
4, 13-14 – Luc 14, 25-33
Jésus met ses auditeurs en garde contre deux tentations opposées :
élaborer des projets trop ambitieux (construire une tour sans pouvoir
finir – entrer en guerre sans chance de vaincre) mais aussi contre des
intentions trop axées sur le confort personnel (vouloir suivre le Christ
sans rien abandonner) Il recommande à ses disciples de ‘commencer par
s’asseoir’ pour peser les enjeux de ce qu’il faut entreprendre.
Que veut dire cette expression dans ma vie de chrétien ? Ce n’est
certainement pas un appel à l’oisiveté dans l’attente que les événements
se présentent à moi ! Il s’agit avant toute chose de prendre le temps
de se tourner vers le Seigneur afin de discerner si la vocation que je
ressens vient bien de Dieu et non pas d’une simple envie personnelle :
avant toute action, un temps de prière est essentielle, même – surtout
– si la situation est urgente.
Les capacités qui me sont propres ne sont pas en cause, si Dieu me confie
réellement une mission, l’Esprit Saint me donnera toutes les possibilités
pour la réaliser : « ne vous inquiétez pas d’avance pour
savoir ce que vous direz, mais dites ce qui vous sera donné à cette heure-là.
Car ce n’est pas vous qui parlerez, mais l’Esprit Saint. » (Marc
13,11) ; phrase dans laquelle je peux remplacer les verbes ‘dire’
et ‘parler’ par le verbe ‘faire’.
‘Commencer par s’asseoir’ n’est donc pas seulement une évaluation
de mon aptitude à effectuer ce qui m’est demandé, c’est avant tout une
supplication où je dirai dans une attitude de prière : ‘Seigneur,
je ferai ce que je pourrai faire, j’ai confiance que Tu feras le reste !’
L’accomplissement de cette mission dépend entièrement de cet acte de foi ;
ce ne sont pas mes simples forces qui seront en œuvre : j’utiliserai
les forces données par le Seigneur : « Je vous le dis :
celui qui croit en moi fera les œuvres que je fais. Il en fera même de
plus grandes, parce que je pars vers le Père, et tout ce que vous demanderez
en mon nom, je le ferai, afin que le Père soit glorifié dans le Fils. »
(Jean 14,12-13)
‘Commencer par s’asseoir’ consiste aussi à accepter le discernement
de l’Eglise saint Paul lui-même va à Jérusalem pour faire vérifier par
les Apôtres et les ‘anciens’ le bien-fondé de son enseignement
(cf. Actes 15) Il est donc important de considérer que la mission n’est
pas ‘mienne’, une possession personnelle mais je sais m’en détacher
pour qu’elle entre, à sa place, dans la mission de toute l’Eglise.
Mais dans les circonstances actuelles où, pour beaucoup, nous sommes
bloqués dans nos habitations, cela n’est pas ‘Commencer par s’asseoir’
car dans cette locution il y a deux aspects essentiels :
- Il s’agit d’un acte volontaire, c’est une décision que nous prenons
personnellement pour réfléchir avant d’entamer une action ;
- Il s’agit de mettre ce temps d’introspection sous le regard de Dieu
pour discerner avec l’aide de l’Esprit Saint quelle est la meilleure
attitude à adopter.
C’est donc maintenant qu’il faut ‘Commencer par s’asseoir’ pour
envisager comment faire fructifier ce temps imposé de l’extérieur. Quelle
tour avons-nous à construire ? Quelle bataille devons-nous gagner ?
Nous avons à consolider notre foi chancelante ! Nous devons combattre
l’oisiveté stérile ! Cessons de chercher à tuer le temps dans notre
confort, regardons autour de nous, des hommes et des femmes plus isolés,
plus dépendants ont besoin de notre attention. Ne restons pas assis, relevons
nous pour vivre l’Evangile : Tout ce « que vous l’avez
fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez
fait.’ » (Matthieu 25,40)
Père JeanPaul Bouvier
Curé de Notre Dame de Nesle
Administrateur de sainte Radegonde
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jour 6
Jeudi 5 novembre 2020
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Isolé(e)(s)
Philippiens 3, 3-8a – PSAUME 104 (105), 2-3, 4-5, 6-7
– Luc 15, 1-10
N’est-il pas étonnant ce berger qui semble abandonner un troupeau de
quatre-vingt-dix-neuf têtes pour aller chercher une seule brebis qui s’est
perdue ? Les bêtes sauvages l’ont sans doute repérée et sont en train
de la traquer. N’est-ce pas trop tard ? Peut-être est-elle déjà dévorée,
son corps devenu un enjeu disputé par ses prédateurs. La démarche du berger
est également dangereuse pour lui-même : il risque sa propre vie
en voulant arracher leur proie à des animaux féroces et affamés.
Avant de partir dans sa recherche, le berger n’a pas abandonné son troupeau
mais il l’a regroupé. C’est dans son rassemblement effectué dans la confiance
faite à son pasteur qu’il va trouver la force de se défendre. Par son
écoute fidèle de la parole qui lui a été donnée chacune des brebis participe
à son rang à la recherche de celle qui s’est égarée.
A son retour, portant celle qui manquait sur ses épaules, le berger la
remet à sa place dans le troupeau. Il peut alors aller se réjouir avec
ses amis.
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Dans les circonstances actuelles, chacun d’entre nous, séparé de personnes
que nous aimons en raison d’éléments qui ne sont pas de notre ressort,
nous avons le sentiment d’être cette brebis isolée, livrée à elle-même
dans un monde qui semble hostile. Plus que jamais nous nous sentons cernés
par les tentations induites par le confinement et qui guettent nos moments
de faiblesse et de découragement. La brebis de la parabole ne pensait
sans doute pas que le berger viendrait la chercher, mais il est venu.
Nous doutons peut-être du secours que le Christ peut nous apporter, mais
il est là, près de nous, prêt à prendre avec nous le joug qui pèse sur
nos épaules.
Les brebis restées dans le troupeau participaient par leur obéissance
à la parole du berger à la possibilité du salut de celle qui est partie.
Mais, aujourd’hui, nous avons l’impression qu’il n’y a plus de communauté
chrétienne pour nous soutenir parce qu’il n’y a plus d’assemblée dominicale.
C’est vraiment réduire la notion d’Eglise à ce qui est visible !
Lorsque nous disons cette prière que le Fils a apprise à ses disciples,
le premier mot, notre, nous indique que « une foule
immense que nul ne pouvait dénombrer » (Apocalypse 7,9) se tourne
vers le Père en même temps que nous !
N’hésitez pas à demander à vos prêtres à quelle heure ils célèbrent –
non pas ‘leur’ messe – mais la messe pour vous et
toute la population à laquelle ils ont été envoyés afin de vous y associer
ne serait-ce que par une brève pensée – ce n’est pas la durée qui compte.
Ainsi les communautés chrétiennes locales seront unies dans une prière
fervente et commune autour et par le Seigneur.
Père JeanPaul Bouvier
Curé de Notre Dame de Nesle
Administrateur de sainte Radegonde
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jour 7
Vendredi 6 novembre 2020
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Imitez moi !
Philippiens (3, 17 – 4, 1) – PSAUME (121
(122), 1-2, 3-4ab, 4cd-5) – Luc (16, 1-8)
Saint Paul ne manque pas d’aplomb pour avoir dicté cette phrase. Et il
est sincère !
En fait, le terme grec sunmimhthV
désigne celui qui imite avec d’autres. Il s’agit donc bien d’un
ensemble, d’une communauté qui est invitée à imiter Paul. Dans
le cœur de cette communauté, je me dois d’imiter l’Apôtre, mais je me
dois aussi d’imiter mes frères tout en les incitant à imiter le modèle.
Saint Paul ne prétend pas être parfait à lui tout seul et la suite de
la phrase le prouve « regardez bien ceux qui vivent selon l’exemple
que nous vous donnons », il ne demande pas à la communauté d’imiter
servilement ou bêtement comme un singe peut mimer l’homme mais au contraire
il lui propose d’êtred’être dynamique et inventive.
D’ailleurs si nous utilisons une comparaison artistique, entre le modèle
et l’œuvre, il y a un monde d’écart. Le même modèle peut avoir une interprétation
différente suivant l’interprète. La même sonate jouée par des pianistes
différents prend des colorations diverses ; le plus classique des
ballets trouve une nouvelle jeunesse avec un autre chorégraphe ;
les peintres et les sculpteurs ont rendu les mêmes scènes de la vie de
Jésus et de Marie en fonction de leur propre vue de ces événements.
Ainsi en est-il de l’imitation de l’Apôtre en particulier et des saints
en général, il ne s’agit pas de faire la même chose, il s’agit
de répondre à l’appel de Dieu dans MA vie. Si je me contente de copier
tel ou tel saint, je ne répondrais pas à mon appel personnel, je m’appliquerais
en vain à répondre à la vocation de ce saint, mais pas à la mienne.
Alors comment faire ?
Faire comme eux ne signifie pas faire la même chose. Faire comme eux
c’est écouter et méditer la Parole de Dieu, pour pouvoir l’annoncer ;
c’est célébrer les sacrements, confession et eucharistie, pour pouvoir
en vivre ; c’est prier seul et avec d’autres, en dialoguant avec
Dieu, Père Fils et Esprit plutôt qu’en soliloquant ou en ânonnant ;
c’est faire confiance à l’Eglise, Corps du Christ, car elle nous montre
le chemin qui conduit vers le Royaume, même si je suis souvent sur le
bas-côté ; c’est voir le Christ dans mes frères et sœurs, et découvrir
ceux qui souffrent spirituellement, matériellement, physiquement, moralement.
Si je réussis cela, je serais non seulement un imitateur de l’Apôtre
ou des saints, mais un disciple de Jésus Christ.
Père JeanPaul Bouvier
Curé de Notre Dame de Nesle
Administrateur de sainte Radegonde
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jour 8
samedi 7 novemvre 2020
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L’argent malhonnête
Philippiens (4, 10-19) – PSAUME (Ps 111 (112), 1-2, 5-6, 8a.9)
– Luc (16, 9-15)
Jésus ne condamne pas l’argent en tant que tel, il constate son manque
de fiabilité et sa place prépondérante dans le cœur des hommes. Même les
aspirations les plus nobles peuvent être perverties par la perspective
d’augmenter la puissance que l’argent semble donner sur les autres hommes.
Le Christ rappelle simplement à ses disciples que l’argent n’est qu’un
moyen et non pas un but en soi. Dans un monde laïcard qui nie Dieu, la
fortune personnelle et la réussite sociale deviennent de nouvelles idoles
au détriment de l’amour et du respect fraternel.
Sans la foi, la culture chrétienne n’est plus qu’une coquille vidée de
l’essentiel.
Nous constatons qu’à Noël les crèches sont devenues folkloriques, lorsqu’elles
ne sont pas interdites au nom de la laïcité, elles sont expurgées de leur
sens profond : l’Incarnation du Fils de Dieu. Le divin enfant y est
placé dès la confection des vitrines, avant même le début de l’Avent !
Seules les festivités, les ripailles et les cadeaux sont perçus par la
plupart des gens, y compris des personnes qui s’estiment chrétiennes.
La fête religieuse disparaît derrière une palissade de réjouissances païennes !
Les solennités de Pâques, de l’Ascension et de la Pentecôte ne sont plus
reçues que comme des week-ends prolongés pour que nous puissions nous
échapper en occultant complétement l’importance de la vigile pascale,
événement central de la foi chrétienne, dont l’assemblée y est malheureusement
clairsemée. Les loisirs supplantent l’approfondissement et la pratique
de la foi, les parents préfèrent que leurs enfants fassent de la danse,
du karaté ou du football plutôt que de leur faire recevoir l’éducation
chrétienne qui leur est due.
La maxime « Dieu premier servi » a disparu, les maîtres
de nos vies sont devenus les apparences, les loisirs et l’argent, objets
de jouissances immédiates qui ne nécessitent pas de réflexions.
Chacun d’entre nous a un rôle essentiel à jouer dans ce contexte, nous
devons – en tant que chrétiens – affirmer notre foi par l’exemple :
« Montre-moi ta foi sans les œuvres; moi, c'est par les œuvres
que je te montrerai ma foi. » (Jacques 2,18) Nous devons considérer
l’argent et les loisirs pour ce qu’ils sont : accessoires, même s’ils
peuvent être utiles et bienfaisants, ils ne peuvent pas devenir premiers
dans la vie d’un croyant.
Actuellement privés de la force donnée par la célébration de l’Eucharistie
communautaire, c’est par notre vie fidèle à l’Evangile que nous avons
reçu et que nous avons en dépôt que nous devons transmettre la Bonne Nouvelle
à nos contemporains
Père JeanPaul Bouvier
Curé de Notre Dame de Nesle
Administrateur de sainte Radegonde
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